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Exposition Jim Hodges |
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Très contrasté, l’oeuvre de Jim Hodges peut être minimaliste par le dépouillement de certaines pièces ou baroque par son exubérance, la richesse des matériaux utilisés, les couleurs somptueuses et chatoyantes dont il fait usage.
L’artiste américain explore aussi bien des matériaux modestes comme le papier, les pastilles de couleur, les fleurs en tissu, que la feuille d’or.
Les oeuvres de Jim Hodges, influencées par la nature, la littérature mais aussi par la spiritualité, allient la simplicité des matériaux à un travail méticuleux et précis de collage, de couture, d’assemblage et de découpage.
Qu’il s’agisse de fines toiles d’araignées en chaîne argentée, de photos découpées, d’assemblages de partitions musicales, de fleurs épinglées ou de miroirs cassés dessinant une autre image de la réalité, Jim Hodges exprime par son travail sa vision originale d’un monde marqué tant par la beauté et la joie de vivre que par la maladie et la mort.
Sa première oeuvre de maturité, One dans laquelle il explore les possibilités d’enlever le dessin du mur pour le déplacer vers l’espace, date de 1987. Elle est composée de dessins au fusain qu’il avait agrafés ensemble de façon à former un cylindre posé simplement par terre. Afin de pouvoir voir l’oeuvre en entier, le spectateur devait tourner autour, faisant ainsi partie intégrante de l’oeuvre.
On retrouve cette même préoccupation dans Arranged, 1996, réalisé à partir d’un livre contenant des reproductions de compositions florales, dont l’artiste a légèrement plié plusieurs feuilles pour recomposer un nouveau bouquet en relief. Cette oeuvre, qui appartient au domaine de la sculpture, témoigne magistralement de la capacité de Jim Hodges à détourner et enrichir le domaine du dessin, qu’il pousse dans ses limites les plus extrêmes.
Si, sur le plan formel, l’expérimentation novatrice avec des matériaux inhabituels reste une constante, l’artiste se montre également fidèle aux grands sujets qui le préoccupent : la nature, la beauté, l’amour, la sexualité, la mort–l’évocation de la fragilité de la vie.
L’évocation du corps humain, et de la peau en particulier, est présente dans plusieurs dessins dans lesquels il explore les possibilités formelles et métaphoriques du ruban adhésif. Il libère cette matière friable, à durée de vie limitée, de son aspect utilitaire pour la sublimer dans des compositions qui annoncent déjà les principaux thèmes de ses oeuvres des années 1990, notamment les toiles d’araignées et les fleurs qui avaient déjà fait une première apparition dans Deformed en 1989.
Les dessins réalisés vers 1991 évoquant les avis de recherche sont moins sombres et plus sensuels. Ils renvoient au monde des westerns et à leur iconographie très codée, du monde masculin notamment, que Jim Hodges traite en utilisant la tradition de la peinture en trompe-l’oeil. Les affiches, dénuées de toute écriture, pourraient servir de supports à des fantasmes sexuels, aspect qui est renforcé par le caractère physique et corporel des noeuds des planches de bois.
Au même moment, il insère son propre organisme dans le dessin, en utilisant une technique d’impression de sa propre invention: transférer un dessin à l’encre sur un autre papier à l’aide de sa propre salive. Il dessine le motif puis le lèche jusqu’à ce que le papier soit suffisamment humide pour pouvoir être imprimé sur une autre feuille. Les premières oeuvres de ce type sont plutôt de petit format, à l’exception du grand dessin du Whitney Museum of American Art, et reprennent des petits dessins de fleurs, de toiles d’araignées, de chaînes ou de crayonnages automatiques. Lorsqu’il reprend cette même technique en 2006, le format et le contenu ont considérablement changé. Dans une oeuvre hommage à sa mère décédée, il crie sa douleur et sa profonde tristesse au moyen de lettres ornées, comme sorties d’un livre d’heures médiéval : Oh for Crying out Loud.
L’évocation de l’amour est omniprésente dans son oeuvre, que ce soit sous la forme du mot «Love» qui apparaît régulièrement ou simplement évoqué avec des coeurs. Jim Hodges dévoile des bribes de cet amour à l’aide de rébus : dans Sans titre, 1989, des lettres capitales découpées et disposées négligemment sur une feuille de papier forment une phrase «JIM LOVES T»–ou alors «TIM LOVES J», l’un n’excluant d’ailleurs jamais l’autre. Sans titre (Aigle et papillons) forme quant à lui un double portrait délicat et poétique de l’artiste et de son grand ami Felix Gonzalez-Torres. L’oeuvre He and I (1998), dessin mural (non exposé) formé de deux cercles identiques de couleurs différentes qui se superposent en partie, est encore un double portrait qui célèbre, comme tant d’autres artistes avant lui, une relation amoureuse.
L’oeuvre dessiné de Jim Hodges dépasse volontiers la feuille de papier traditionnelle pour devenir dessin dans l’espace. C’est notamment le cas des oeuvres dans lesquelles il explore le thème de la toile d’araignée, dont il réalise de nombreuses versions à partir de 1991. Traditionnellement liées à des notions telles que la mélancolie, l’âge ou le déclin, les toiles d’araignées de Jim Hodges, composées de chaînes métalliques (argent, cuivre, acier) sont d’un tout autre caractère, à la fois sensuel et violent. Alors que la toile tissée par l’araignée évoque la saleté et la poussière, celles-ci, composées à la fois d’éléments de bijouterie et de quincaillerie, se réfèrent à la fois à la beauté et à la contrainte. Montrées d’abord dans des expositions de groupe, elles occupaient la place à la fois la moins visible et la plus prévisible pour une toile d’araignée: un placard, un coin du plafond… Elles étaient cependant toujours associées à d’autres éléments sculpturaux: un blouson de cuir, une guirlande de fleurs artificielles… Elles changent ainsi de caractère pour devenir à la fois évidentes et présentes. Hello, again (1994-2003) est une oeuvre exemplaire dans sa simplicité. Dans l’exposition, elle sera rapprochée de deux dessins, également de 1994, dans lesquels l’artiste associe la toile d’araignée au papier. Dans Chained (1994), le mot «Love» est formé de chaînes dessinées à l’encre bleue et les lettres sont reliées entre elles par des toiles, également dessinées, tandis que dans No more dreams/In real time de petites toiles en chaînes métalliques tentent de combler les espaces vides du papier. L’aspect à la fois sensuel et violent de ces oeuvres se ressent, dans les sculptures comme dans les dessins.
Jeune, Jim Hodges a beaucoup lu Jean Genet, et en particulier Notre-Dame-des-Fleurs et Le Miracle de la rose. Ces deux livres, les plus poétiques de l’auteur français, l’ont beaucoup marqué. La symbolique des fleurs est très présente dans l’écriture de Genet, ce qui explique certainement, en partie, leur présence dans l’oeuvre de Jim Hodges, qu’elles soient dessinées sur des serviettes ou artificielles, déconstruites, épinglées ou réarrangées en guirlandes ou en rideaux.
Les fleurs artificielles font leur apparition très tôt dans son travail. Il explique qu’il avait pour ainsi dire cessé de se servir de la couleur lorsqu’il s’est arrêté de peindre, et que c’est grâce aux fleurs artificielles que la peinture refait son apparition dans son oeuvre. Déjà, dans A Model of Delicacy (1992), il associe une petite guirlande de fleurs de soie à des toiles d’araignée en fines chaînes métalliques, commençant ainsi à expérimenter ce matériau qui est loin des matières nobles. Ces recherches aboutissent à deux séries d’oeuvres qui sont parmi les plus caractéristiques du travail de Jim Hodges.
Avec A Dizying Succession (1993), l’artiste inaugure une importante série d’installations murales simplement en épinglant des pétales de fleurs déconstruites en tissu sur le mur. Cela donne de petites oeuvres comportant moins de 100 éléments ou des installations monumentales de plus de 1 000 éléments se déployant sur des murs entiers, comme la carte d’un archipel.
L’importance accordée à la nature est une constante dans l’oeuvre de Jim Hodges. L’idée que l’homme puisse ne faire qu’un avec elle ou redevenir nature, semble contenue dans l’utilisation du motif du camouflage. Son expression la plus radicale se trouve peut-être dans son travail sur le camouflage qui trouve son aboutissement dans la peinture murale Oh Great Terrain (2002), oeuvre présentée pour la première fois en 2002 à New York. Au-dessus, l’artiste installe une photographie d’un tronc de platane, afin de mettre en avant les troublantes similitudes de l’écorce avec la peinture murale. Dans l’oeuvre Into the Stream IV (2006), Jim Hodges applique le motif du camouflage au miroir, qui brouille l’image du spectateur et la fait se fondre dans l’environnement. À la fin des années 1990, il avait expérimenté cette même problématique dans de grands miroirs marouflés sur toile, puis brisés, dont le plus important est, selon lui, celui du Frac des Pays de la Loire.
Le goût de Jim Hodges pour la poésie transparaît clairement dans son oeuvre à travers son utilisation des mots. Ils forment souvent le contenu même de ses dessins, que se soit les quatre lettres de «Love» dans Chained, 1994 ou les trois feuilles de 1998 reprenant des onomatopées–extraites des sons qu’il avait entendus lors de son voyage à Paris à l’occasion d’une exposition–ou des collages de partitions musicales comme dans Sans titre (Love) où ne sont réunis que des fragments musicaux comportant le mot «Love». L’aboutissement de ces travaux sur le langage est certainement le somptueux poème Slower Than This, composé sur six panneaux, dont chaque lettre est découpée dans une photographie de couleur. Exemple beaucoup plus modeste, cette petite feuille désignant, comme une liste de courses, les différentes fonctions qu’un homme peut avoir vis-à-vis d’un autre:«Frère, ami, amant, cousin, mari, copain, compagnon, partenaire, camarade...».
Jim Hodges sait magnifier des matières pauvres et ordinaires, mais il sait aussi se servir de matières
nobles et coûteuses, telles que l’or fin. Dès 2004, il réalise des dessins aux motifs floraux à la feuille d’or,
et, à partir de 2005 sous le titre générique de The Good News, il s’engage dans un projet international
consistant à recouvrir de feuilles d’or chaque page recto-verso d’un exemplaire d’un journal de chaque
pays du globe. Après le New York Times, ce fut The Guardian, Le Monde, Al Nahar Beirut, Tel Aviv…
À chaque fois, le journal lui est rapporté par des amis.