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Exposition Jacques Doucet
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LAAC, DunkerqueExposition du 09 octobre 2010 au 05 mars 2011Jacques et Andrée Doucet, 21 janvier 1990 Rassemblant environ 80 oeuvres pour la plupart issues de collections privées, l'exposition qui se tient au LAAC Dunkerque témoigne des recherches continuelles de Jacques Doucet qui place l’expérimentation au coeur de son travail : expérimentation de la forme au-delà des querelles abstraction-figuration, expérimentation de la matière transgressant le principe d’unité matérielle de l’oeuvre par la diversité des techniques, collage, grattage, peinture, dessins et aussi tapisserie, pétrification..., expérimentation de la couleur et du geste par l’improvisation proche des graffitis, des dessins d’enfants et du crayonnage spontané, expérimentation également au travers de la poésie des titres. Le 22 janvier 2008, Gilbert Delaine, fondateur de la collection du musée, arrivait au LAAC les bras chargés de grands cartons à dessins et de porte-folio. Il avait téléphoné peu avant pour prévenir qu’il arrivait « avec une surprise » … et quelle surprise ! Quelques mois auparavant, Andrée Doucet, veuve de Jacques Doucet, lui avait confié pour le LAAC l’ensemble des estampes réalisées par l’artiste à l’exception d’une seule dont elle-même ne possédait pas d’exemplaire. En quelques minutes, l’ensemble des oeuvres était là sous nos yeux. Ce don d’estampes permettait de conforter l’ensemble majeur et rare des oeuvres des artistes du groupe CoBra conservé au LAAC : 52 oeuvres, sculptures, peinture, gravures de Karel Appel ; trois grandes encres de Pierre Alechinsky ; une gouache de Corneille ; un grand diptyque à l’encre de Christian Dotremont ; trois rares dessins à quatre mains par Pierre Alechinsky et Karel Appel. De plus, Jacques Doucet, le seul Français ayant participé activement au groupe Cobra, était jusqu’alors absent des collections. Depuis, les rencontres avec Andrée Doucet se sont multipliées. L’idée d’une exposition a vu le jour très vite et d’emblée, la volonté d’organiser une exposition itinérante s’est imposée. Andrée Doucet avait été sollicitée pour une exposition par le musée des Beaux-Arts de Quimper « Jacques Doucet et Max Jacob » et a décidé de réunir les deux musées français. Par ailleurs, le LAAC de Dunkerque entretenant des relations avec le musée Cobra d’Amstelveen, notamment par des prêts d’oeuvres, a lancé une invitation acceptée avec enthousiasme. La générosité d’Andrée Doucet et de nombreux collectionneurs privés qui ont accepté de se séparer de leurs oeuvres durant plus d’un an, ainsi que les prêts d’institutions en France et en Europe du Nord, ont permis de rassembler plus de 80 oeuvres de l’artiste, de la période Cobra jusqu’aux oeuvres ultimes. Des peintures, des oeuvres d’arts graphiques, notamment des gouaches et des petits collages très spontanés qu’il a pu réaliser dans les années 1960, quelques sculptures et « pétrifications », des céramiques et une tapisserie permettent de rendre compte de la spontanéité expressive de l’artiste et de sa curiosité pour expérimenter toutes sortes de techniques...
Commissariat de l’exposition : Aude Cordonnier, conservateur en chef des musées de Dunkerque -
Sophie Warlop, conservateur adjoint des musées de Dunkerque
Marqué depuis sa plus tendre enfance par une histoire familiale douloureuse, Jacques Doucet, naturellement révolté et volontiers insolent exprime, dès ses premières oeuvres créées durant l’Occupation, son désir de liberté. À vingt ans, après avoir voulu être poète, il choisit de devenir peintre. Il retient pour modèles des artistes novateurs tels Henri Matisse, dont il reprend l’usage des couleurs saturées dans La Table rouge (1945), ou encore Paul Klee et Joan Miró, alors connus d’un seul petit cercle de galeristes et d’amateurs d’art, qui le séduisent par la liberté de leurs dessins. Dès 1947, ses oeuvres s’avèrent prémonitoires et annonciatrices de ce que sera le groupe CoBrA. Jacques Doucet invente spontanément une forme de figuration ironique et étrange, associe des matériaux insolites tels le goudron, le papier et le carton déchirés, et mêle, sans égard pour les règles établies, les techniques les plus diverses comme cela apparaît dans l’oeuvre Lapidation. Cette même année, à l’occasion de sa première exposition à Budapest, il rencontre Corneille et découvre le surréalisme hongrois. De retour à Paris, il adhère au Groupe surréaliste révolutionnaire puis rejoint Corneille à Amsterdam où il fait la connaissance de Karel Appel. Il réalise, à leur invitation, les Équilibristes pour la couverture du dernier numéro de la revue hollandaise "Reflex". En avril 1948, les surréalistes révolutionnaires français organisent à Paris une conférence qui rassemble également des surréalistes belges et le Groupe expérimental hollandais. Leurs débats mènent cependant à une impasse. C’est dans ce climat que naît, le 8 novembre 1948, l’Internationale des artistes expérimentaux, dénommée « CoBrA ». Elle se fixe comme objectif de s’opposer à la sclérose, la mesure, la raison, la paralysie et l’académisme de l’art. Durant les trois années de vie de CoBrA, Jacques Doucet est le seul Français à participer à toutes les manifestations du groupe. Il y trouve un cercle d’artistes qui, comme lui, placent l’expérimentation au coeur de leur démarche. Comme eux, il cherche à retrouver la spontanéité de l’enfance perceptible dans les oeuvres Jongleur (1949), première oeuvre de Jacques Doucet à rejoindre des collections muséales au Stedelijk Museum d’Amsterdam en 1949, Hommage à Amstrong (1950) ou Tauromachie (1953). Cependant, tandis que Karel Appel, Corneille et Pierre Alechinsky installés à Paris en 1950 oeuvrent de concert, Jacques Doucet continue à travailler en solitaire. Il collabore néanmoins avec son épouse, Andrée, céramiste, à la réalisation de Jeux d’enfants, série composée de plusieurs assiettes et d’un plat, qui témoigne de sa curiosité pour des techniques multiples.
Pour Jacques Doucet, la liberté d’expression est une valeur fondamentale, ce qui l’amène à se détacher, peu après la fin du groupe CoBrA en 1951, de la dichotomie figuration/abstraction. Comme la plupart des artistes du groupe CoBrA, il considère en effet qu’ « il n’y a pas une peinture figurative et une peinture abstraite, il y a la peinture, où chacun, à chaque époque est contraint à la redoutable liberté de choisir ses propres signes… La mission de la peinture n’a jamais été de rassurer. » Dès 1953-1954, il réalise des peintures dont les formes n’évoquent plus de manière évidente la réalité. Une figure apparaît, avec sa structure et sa matérialité, mais la représentation n’est plus nécessaire : la peinture a pour sujet la peinture. Le recours au titre est devenu inutile. Dans le même temps, les formes créées, au départ centrales et très structurées, posées devant ce qui apparaît comme un fond, prennent peu à peu de l’ampleur ; la composition, qui opposait au milieu des années 1950 la forme principale à l’arrière plan, devient plus unitaire et gagne en cohérence. Parallèlement, l’oeuvre de Jacques Doucet évolue vers des touches de plus en plus larges, des gestes plus amples et ronds et des couleurs de plus en plus contrastées, travaillées en profondeur, avec mille nuances délicates. Si l’artiste peint assez brutalement au couteau dans une matière onctueuse et vibrante, il reste néanmoins attaché aux petits formats, par un souci de perfectionnisme et de rapport intime à la toile. Il racle, griffe, restructure, transforme, efface et recommence, travaille journellement, déconstruit et retouche sans cesse ses peintures. Parallèlement, il réalise des gouaches et quelques collages très libres. Dans quelques oeuvres qu’il appelle tableaux-collages, une partie de la surface est peinte tandis que le reste de la toile est recouvert de sable ou de papier déchiré. D’autres collages associent des lambeaux de dessins à l’encre de Chine ou à la gouache, déchirés par l’artiste. La peinture s’introduit dans le collage comme le collage dans la peinture. Au travers des oeuvres sans titre de cette période, Jacques Doucet exprime avec force des sentiments intérieurs face à la réalité quotidienne du monde.
Depuis toujours, Jacques Doucet déchire, détruisant ainsi des « ratés » ou des oeuvres d’étape comme certaines oeuvres de jeunesse, devenues inutiles à ses yeux. Ces fragments retrouvent de l’intérêt au travers de collages. Aux alentours de 1962-1963, il en réalise de très nombreux dans lesquels il intègre tout à la fois ses dessins à l’encre ou à la gouache, des dessins de ses fils, des morceaux de journaux ou de magazines comme le Club Mickey, des grilles de mots croisés, des photos et illustrés divers,… Il affectionne également les éléments en relief comme le carton ondulé, les maries-louises récupérées, introduisant de-ci de-là une ardoise d’écolier, un carton toilé, un couvercle de boîte, une vieille reliure en cuir... Au travers du collage, Jacques Doucet atteint une liberté nouvelle, employant les matériaux pour leur faculté à aiguiser le regard et aussi à évoquer le toucher par les contrastes lisse/froissé, froid/chaud, en creux/en relief... Il affectionne la contradiction expressive des formes et des matières et se délecte à réaliser, tel un miniaturiste, de petits formats, délicats, modestes et intimes. Il se plait également à réemployer des cadres récupérés, qui font partie intégrante de ses précieux assemblages. Si Jacques Doucet suit sa voie personnelle et ne se laisse aucunement troubler par l’avènement du Pop Art et du Nouveau Réalisme, il rejoint ces mouvements par l’utilisation de matériaux réels qu’il inclut dans ses oeuvres. Parallèlement, Jacques Doucet poursuit d’autres expérimentations. Il réalise plusieurs gravures suivant divers procédés, eaux fortes, aquatintes…, un carton d’une tenture pour les Gobelins et quelques sculptures. Il peint des oeuvres, proches de ses collages, où les formes s’imbriquent et où les couleurs, toujours travaillées en épaisseur pour gagner en vibration, se font plus douces et harmonieuses. Les titres réapparaissent vers 1961-1962, évoquant le paysage, l’instant… sources de son inspiration. Travailleur acharné et perfectionniste, Jacques Doucet met au point vers 1969-1970 un nouveau type d’oeuvres, les « pétrifications ». Ces assemblages s’apparentent à des collages en volume, rendus possibles par le pouvoir agglomérant de la résine dans laquelle ils sont coulés. S’y rencontrent, de manière inédite, des matériaux et objets qui, visibles de tous les côtés, semblent flotter dans une masse semi-transparente. C’est une nouvelle occasion pour l’artiste de détourner des objets quotidiens tels un panier à salade écrasé, des douilles,...
Très jeune, Jacques Doucet découvre la poésie d’avant-garde et, dès 1942, année où il rencontre Max Jacob, il écrit ses premiers poèmes. À l’époque, il cherche encore sa voie entre écriture et peinture. Durant toute la période CoBrA, il dresse des listes de titres potentiels pour ses oeuvres, très souvent poétiques comme « Prenez garde aux hirondelles ! ». Par la suite et pendant plus de dix ans, il cesse de dénommer ses oeuvres, préférant laisser à l’impact visuel le soin de transmettre la part émotive de l’oeuvre. Au milieu des années 1960, alors que certains de ses poèmes sont pour la première fois édités, Jacques Doucet donne de nouveau des titres à ses oeuvres. Ceux-ci sont extraits de ses propres poèmes comme Terre d’Ocritude ou évoquent un compagnon de CoBrA, Jorn, si le soleil seul nous..., un musicien, En écoutant Bix Beiderbeck, un lieu, le Passage du Haïdouk, un fait d’actualité, Est-Ouest...
"Terre d’ocritude
L’oeuvre plastique de Jacques Doucet, inspiré par ses voyages et ses rencontres, devient plus que
jamais son mode d’expression privilégié. Il lui permet de s’arracher à ses angoisses liées aux aléas de
sa vie, telles les disparitions brutales de l’un puis de l’autre de ses fils : l’artiste transcrit sa détresse
dans ses peintures (il dira à Andrée, son épouse : « tu n’as pas le monopole de la douleur ! ») au
travers d’un labyrinthe inextricable de formes nerveuses et de couleurs sombres. Les formats
s’agrandissent, comme si l’affrontement avec une grande surface était rendu indispensable par la
volonté salvatrice de s’exprimer et décuplait son acharnement. Par ailleurs, Jacques Doucet ne cesse
de reprendre ses oeuvres, de les retravailler, parfois des années durant, comme pour Le Nuage en
pantalon. La matière devient plus légère, les empâtements plus rares, les accumulations, couleur sur
couleur, plus feutrées. La surface et la profondeur de l’oeuvre sont couvertes d’un enchevêtrement
infini de signes.
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