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Lori Hersberger |
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Lorsqu’il peint, il conserve certaines références à ses vidéos. Ses longs formats paysages reprennent ceux de l’écran de cinéma.
Dès la fin des années 90, ses oeuvres se caractérisent par des couleurs fluorescentes et acides, qu’il applique sur toile, sur miroir, ou directement sur le mur, de différentes manières : spray, éponge, dripping, pochoir, etc.
Il cherche à introduire chez le spectateur une perception de l’hyper-artificialité. Verte, rouge, orange, jaune, bleue, la couleur libère une radiance dynamique, gardant toute sa puissance malgré les superpositions ou les débordements et donnant une impression de fl ux permanent.
En fait, utilisant librement peinture, environnement, polystyrène, néons, architecture, film, installation, il combine les matériaux complémentaires ou contraires, pour créer ce que Jan Verwoert qualifie de "lieux de fabrication de soi".
En contrepoint à ses espaces aux couleurs fluos chargées d’énergie, l’artiste réalise des installations plongées dans l’obscurité, dans lesquelles il met en scène peinture, néons et miroirs. Les miroirs, disposés sur le sol puis brisés, reflètent un environnement fragmenté, disloqué. Avant de casser ses miroirs, Lori Hersberger choisit le point d’impact. Prenant en compte les caractéristiques du matériau, il cherche à anticiper la course des lignes de rupture, qui reste cependant soumise au hasard. Cet acte de destruction contrôlé fait apparaître un maillage, un enchevêtrement de traits, tel un dessin abstrait qui se multiplie à l’infini.
Le rôle du miroir. Pour Lori Hersberger, le miroir est un matériau pleinement moderne. Il fait référence à l’urbain, aux technologies, au contrôle et à la surveillance. Le verre ainsi éclaté évoque un refus, une révolte mais aussi un danger, une tension. Il se réfère à une symbolique essentiellement contemporaine. En effet, si dès la Haute Antiquité le miroir occupe une place importante dans la littérature et les arts, son rôle a largement évolué depuis.
Les miroirs convexes du Moyen-Âge ouvraient le champ aux déformations, les miroirs plans de la Renaissance généraient de nouvelles recherches, aboutissant entre autres à une meilleure appréhension de la perspective. À la période moderne, le miroir prend d’autres dimensions. Son évolution technique (format, opacité, transparence, couleur…) lui ouvre une infinité d’utilisation et démultiplie les interprétations. Il devient très présent dans l’art contemporain. Que ce soit le rapport entre le sujet et son reflet, entre le visible et l’invisible, entre le réel et l’irréel, la réflexion s’élargit encore sur des questions d’illusion et de contrôle, devenant encore plus complexe avec la question du miroir sans tain qui se joue du narcissisme tout en basculant dans l’univers plus inquiétant de la sécurité et de la surveillance.
Lori Hersberger, lui, rend ce miroir à la fois visible par ses lignes brisées tout autant qu’invisible par le refl et qu’il induit, plongeant tour à tour le visiteur dans un abyme sans fond dans ses pièces noires et dans un monde sans gravité dans ses pièces blanches.
Le néon et la couleur. Un autre "matériau" important dans son oeuvre est sans conteste le néon. Il ne l’utilise pas dans sa froideur clinique mais joue sans cesse des couleurs. Tableau sans image, sans fond, provoquant le néant, espace créant une ambiance spatiale dans une salle obscure, il modifie la perception. Alors que dans ses espaces inondés de lumière, des flashes mobiles, hypnotiques, s’affrontent aux brisures des miroirs.
Le sol avalé par le miroir, les murs dissous par les néons sont les supports discrets d’une expérience optique, et non un simple lieu de présentation. L’espace se divise et se démultiplie, créant une atmosphère intense, qui change avec la circulation et le regard du spectateur.
Ce dernier déambule dans l’installation mais va aussi s’y refl éter, s’y abîmer. Il est dès lors complètement intégré à l’oeuvre. Il prend part à cet "environnement". Il devient constituant de l’installation dans un jeu de duplication et de reproduction.