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Jacob Kassay |
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La surface unie et réfléchissante des peintures est d’une certaine façon temporairement modifiée par le passage du visiteur. Cette altération est à prendre au sens musical du terme, il ne s’agit pas d’une dégradation, mais bien d’une modification de la hauteur et de la source de la lumière, comme un dièse ou un bémol modifie la hauteur d’une note sur une partition. La juxtaposition de l’ensemble des peintures est aussi importante que les reflets de la lumière ou le rendu opaque de l’environnement se réfléchissant à la surface du tableau. Les variations de la surface picturale sont des composantes inhérentes de l’expérience de ces oeuvres. À ce titre, l’artiste contrôle soigneusement leur reproduction, afin de ne pas diffuser des images qui transformaient ces oeuvres en de simples tableaux à la surface plate et argentée. Il refuse donc toute prise de vue frontale et cadrée sur une seule peinture.
Les peintures de Kassay créent un espace, les reflets opaques et flous donnant l’illusion de la profondeur. Au-delà de l’impact de la lumière qui modifie la perception de n’importe quelle peinture, c’est davantage l’importance donnée à l’espace entre le spectateur et la planéité de la toile qui devient une mise en abîme de la part immatérielle et conceptuelle de la peinture.
S’agit-il d’une évocation de l’immatérialité telle qu’Yves Klein l’a révélée avec ses monochromes bleus IKB ? L’artiste cherche-t-il à s’inscrire dans l’alignement de la tradition historique qui consiste à concevoir le tableau comme une fenêtre sur le monde et sa possible représentation? Serait-ce plutôt une référence à l’usage des miroirs dans les oeuvres de l’Arte Povera ou de l’art minimal (Smithson, Pistoletto ou Morris) ?
Kassay cultive délibérément l’opacité du reflet. L’effet paradoxal de ces objets-peintures joue sur l’impossibilité de cette synthèse trans-historique et convoque en filigrane la volonté moderniste, peut-être absurde, de vouloir radicalement rompre avec la peinture classique par le biais du monochrome.
L’artiste est cependant venu à la peinture par le biais de la photographie. La durée, l’instantané lié à la diffusion de la lumière, la fabrication d’une image en perpétuelle révélation et la profondeur de champ sont autant de termes qui permettent de mieux saisir son oeuvre et qui sont empruntés au vocabulaire de la photographie.
Le procédé technique de ces images argentées participe d’une forme de nostalgie, évoquant les techniques photographiques archaïques de la fin du 19ème siècle. Bien que ces peintures soient réalisées industriellement, Kassay a détourné la fonction première de la photographie. Chaque peinture offre un résultat formel différent, il ne s’agit plus donc plus de reproduire. Il a également délégué son geste à l’industrie. Une distance critique s’établit ainsi par rapport à la nostalgie d’une technique devenue obsolète et aux interprétations de ces surfaces faussement expressionnistes. L’artiste opère donc par le transfert d’un médium à l’autre.
L’exposition articule de multiples réflexions sur l’illusion de la sérialité et l’impossible répétition, sur la perte liée au transfert comme à l’interprétation. Telle une extension de ces propositions visuelles, une collaboration entre Rhys Chatham, compositeur et musicien minimaliste expérimental, et Jacob Kassay, fera partie intégrante de l’exposition.
Caroline Soyez-Petithomme