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Haute Culture : General Idea

Une rétrospective, 1969-1994

Musée d’Art moderne de la Ville de Paris

Exposition du 11 février - 30 avril 2011




Première rétrospective dédiée au collectif canadien General Idea, "Haute Culture : General Idea" propose, à travers une sélection de près de 300 oeuvres, une vision globale et dynamique de son travail, sur lequel plane l’ombre de Miss General Idea, personnage fictif qui fut à la fois muse et objet, image et concept.

Fondé en 1969 à Toronto par, Felix Partz, Jorge Zontal – tous deux décédés en 1994 - et AA Bronson, le collectif se dote d’un nom générique lui permettant de se "libérer de la tyrannie du génie individuel". Il élabore une oeuvre complexe où s’entremêlent réel et fiction au service d’une relecture mordante, transgressive et souvent parodique du monde de l’art et de la société.

General Idea part d’une conception de l’image vue tel un virus infiltrant le réel, s’en empare afin de l’habiter et d’en modifier le contenu. Il élabore ainsi une version alternative de la réalité.

Le parcours non chronologique de l’exposition traverse les principales interrogations du trio. Des thèmes tels que l’artiste et le processus créatif, le glamour comme outil de création, les liens entre médias et culture de masse, l’architecture et l’archéologie sont ainsi abordés. La sexualité, considérée comme symbole d’une organisation sociale à subvertir et le sida, à travers le tentaculaire et emblématique projet AIDS, sont également envisagés.

Entre peintures et installations, sculptures et photographies, vidéos, magazines et programme télévisé, l’exposition explore le caractère multimédia d’une oeuvre qui n’a rien perdu de sa fraîcheur et apparaît rétrospectivement comme anticipatrice de certaines évolutions du monde de l’art actuel, visionnaire d’une société en pleine mutation.

Commissaires de l’exposition : Frédéric Bonnet et Odile Burluraux.



Parcours de l’exposition


  • En introduction à l’exposition, dans la vidéo Test Tube, la palette colorée de l’artiste est assimilée aux couleurs de la mire télévisée. Cette oeuvre insiste sur la conception de l’image selon General Idea, tandis que le Colour Bar Lounge traite de l’ambiguïté de l’image, et des préoccupations sociales que sa diffusion induit. Se référant à des cocktails, au sens propre comme au sens figuré, ces deux oeuvres constituent également une invitation à effectuer des mélanges culturels, et à considérer l’altérité comme un apport et non comme une menace. XXX bleu, simulacre de peinture gestuelle, entre hommage et irrévérence, rappelle les performances d’Yves Klein.

  • Dès ses premiers travaux, General Idea s’interroge sur la création à travers un certain nombre d’oeuvres conceptuelles. Par exemple, dans la performance Canvas Weaving, Felix Partz tisse une toile qui ne sera jamais utilisée, faisant référence aux supports traditionnels du peintre. Ils développent également une pratique de Mail art (art postal), en envoyant à leurs connaissances de petites cartes souvent composées d’une image, ou quelques phrases induisant à exécuter une action.

  • General Idea fait de la fiction un ressort permanent de son oeuvre. En 1971, le collectif crée un personnage mythique qui deviendra leur muse, métaphore de l’oeuvre et de l’idée. Ils décident qu’en 1984, soit treize ans plus tard, Miss General Idea sera révélée au public au cours d’un concours de beauté. En attendant, deux autres Miss General Idea sont couronnées en 1970 et 1971 (The 1970 et 1971 Miss General Idea Pageant).

    Des photos, des objets et une brève vidéo inédite rappellent ces événements. Pour le collectif, le concours de beauté est une évocation conceptuelle du processus de création artistique, de la production et de la présentation d’une oeuvre d’art. De 1971 à 1984, toute l’oeuvre a pour objet de créer les éléments nécessaires à l’aboutissement de leur fiction.

  • L’originalité de General Idea a été de théoriser, entre sérieux et provocation, la notion de glamour comme facteur de création et de reconnaissance pour les artistes. Un manifeste sur ce thème parait en 1975 dans FILE, magazine qu’ils ont fondé en 1972. Au cours des années 1970, c’est par le biais de la performance que General Idea travaille sur le glamour. Ils créent des accessoires comme la V.B. Gown, une robe réalisée avec des stores vénitiens. Ils utilisent aussi la Miss General Idea Shoe, soulier trouvé au talon vertigineux et à l’allure fétichiste qui, transformé en compas, devient parfois outil de création et apparaît dans des photographies.Tout en menant une recherche du grandiose et de l’éblouissement, General Idea conserve des références constantes au vocabulaire et à la culture populaire.

  • L’art de General Idea ressemble à des décors dans lesquels les artistes se mettent en scène dans différents rôles : en bébés ; entourés de leurs objets fétiches comme le tube à essai en forme de dollar ou la ziggurat ; ou encore déguisés en caniches, un verre à cocktail à la main. Alter ego et référence récurrente, souvent lisse et bichonné, ce chien représente pour General Idea « l’instinct de plaire », une image gay et un élément d’inspiration.

    Les caniches apparaissent notamment dans le triptyque Reverie, la série de blasons The Armoury of the 1984 Miss General Idea Pavillion exposée dans le hall du musée, et des performances comme XXX bleu (1984), présentée au début de l’exposition, et dans laquelle des caniches ont servi de pinceaux aux artistes.

  • Entre 1975 et 1979, General Idea a réalisé cinq séries de Showcards (soit 304 au total). Ces cartes rappelant des prospectus publicitaires présentent chacune une image et un texte manuscrit relatif aux préoccupations des artistes. Toute la théorie de General Idea est dévoilée dans ces documents.

  • L’intérêt de General Idea pour la culture de masse conduit les trois artistes à en utiliser certains principes dans leurs travaux, comme par exemple la Boutique du Pavillon de Miss General Idea 1984 où étaient mis en vente les multiples édités par le collectif. Pour General Idea, la création artistique est devenue un produit de consommation courante. Des Pasta Paintings en pâtes alimentaires reproduisent des logos de marques comme Marlborough. Symbole de la société de consommation et des préoccupations liées aux droits d’auteur, des signes « © » apparaissent également sur plusieurs tableaux, en cuir sur denim ou à la peinture dorée sur toile de lin. Dans la même logique, le public de l’époque était fréquemment invité à participer à des performances, comme dans Manipulating the self ou la vidéo Blocking.

  • General Idea s’est inspiré des média de masse et du format des programmes télévisés pour certains de ses films dont Pilot, véritable documentaire télévisé réalisé pour la chaine TV Ontario. Souvent associée à la palette du peintre, la mire de la télévision apparaît de manière récurrente, notamment dans la grande installation Test Pattern: TV Diner Plates from the Miss General Idea Pavillion, composée de trois « écrans » en assiettes peintes aux couleurs de la mire.

  • De même est utilisé le modèle de la presse magazine, avec la publication, de 1972 à 1989, de vingt-six numéros de leur revue FILE Megazine dans lequel ils plagient la maquette du magazine américain LIFE. A l’origine, FILE était destiné à partager, avec d’autres artistes canadiens avec qui ils étaient en correspondance, leurs travaux et expériences. Progressivement son champ s’est étendu, notamment à des chroniques de la vie nocturne, sur le principe d’« Interview », le magazine d’Andy Warhol, à qui General Idea s’est beaucoup intéressé.

  • Une section de l'exposition traite également de la construction et de la destruction du mythique Pavillon de Miss General Idea 1984. Ce Pavillon fictif symbolise les lieux de présentation de l’art. Il est évoqué à travers des reconstitutions imaginaires, comme une palissade du chantier de construction, en forme de puzzle, ou les Blue Prints, des plans d’architecture. Quatre photos, Burning Ziggurats, témoignent de la destruction du Pavillon (aussi fictive que sa construction) au cours d’une performance en 1977. General Idea a également créé des vestiges du bâtiment. Certains présentent des décors peints dans le style pompéien de la Villa des Mystères. Les saynètes diverses y sont animées par des caniches. La corne d’abondance (symbole de l’inspiration), autre élément clef dans l’oeuvre de General Idea, est très présente dans ces peintures.La vidéo Cornucopia relate ces découvertes archéologiques. À la fois architectes et archéologues, General Idea a constamment construit et redécouvert sa propre mythologie.

  • Dès les années 1970, à l’époque même où émergent les revendications concernant les droits des homosexuels, General Idea s’interroge de manière originale sur la sexualité. Sans se limiter au sujet de l’homosexualité, ils explorent la forme du triangle et ses implications tant dans le champ social que dans celui de la création. Mondo Cane Kama Sutra en est un exemple : des caniches aux formes schématiques s’ébattent dans des positions inspirées du Kama Sutra. Des objets à la forme suggestive et une série de dessins hybrides inédits de Jorge Zontal complètent cette thématique. La figure du trio, modèle anti-patriarcal, apparaît en outre dans des Showcards et d’autres oeuvre traduisant des interrogations relatives à une structuration sociale et familiale à subvertir.

  • Dès 1987, General Idea s’intéresse au désastre sanitaire et social que constitue le sida, et le traite comme un sujet à part entière. Inspiré par les principes de Marshall McLuhan sur les médias de masse, les artistes ont toujours considéré que l’image et l’oeuvre d’art avaient le pouvoir de s’immiscer dans tous les domaines de la société. C’est donc naturellement qu’ils assimilent le mode de diffusion de l’art à celui du virus, et lancent leur tentaculaire projet « AIDS », qui les occupera jusqu’en 1994.

    L’image maîtresse de ce projet est une peinture apparue en juin 1987 à New York, dans une exposition organisée au profit de la lutte contre le sida (elle est exposée au début du parcours). Il s’agit d’un détournement du célèbre LOVE créé en 1964 par Robert Indiana, artiste américain associé au Pop Art. General Idea s’approprie cette icône d’une génération, en remplaçant « LOVE » par « AIDS », le nom de la maladie devenu un nouvel emblème des années 1980.

    Ce motif est décliné en diverses formes : des affiches dispersées dans le monde entier, de Toronto à Berlin, en passant par Amsterdam, et du papier peint qui ponctue le parcours de l’exposition. De même est évoquée là la thématique des soins, à travers des gélules Pla©ebos. Ici comme dans toute l’oeuvre de General Idea, les références à l’Histoire de l’art sont fréquentes - par exemple Achrome Manzoni. Infe©ted Mondrian reprend un tableau de Piet Mondrian dans lequel les artistes ont glissé du vert, couleur que le peintre hollandais n’a jamais utilisé dans ses tableaux néoplastiques.

    C’est sur un clin d’oeil que l’installation P is for Poodle: The Milky Way from the 1984 Miss General Idea Pavillion conclut l’exposition. Elle présente une étable de caniches, avec de la paille et des tabourets à traire. Trois chiens, les yeux vers le ciel, contemplent la voie lactée et la constellation du « Canus Major ».



    Vidéo Exposition General Idea





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