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Fayçal Baghriche

Quelque chose plutôt que rien

Le Quartier, Centre d'art contemporain de Quimper

Exposition du 31 janvier au 21 mars 2010


Procédant par collecte de récits ou de traces, assemblage d'objets ou de films, Fayçal Baghriche propose des images qui déjouent les réflexes d'identification. Pour cette exposition, il réunit un ensemble d’images d’où surgissent des formes involontaires, ainsi que des objets qui se transforment en perdant leur fonction première.

Dans "Les grottes merveilleuses en Algérie", Fayçal Baghriche enregistre un guide qui, au cours de sa visite, propose des analogies entre les formes des stalagmites et les monuments du monde, comme la statue de la Liberté ou la Tour de Pise. En mettant l’imagination des spectateurs à contribution, l’homme se pose en médiateur entre les formes de cette caverne et le monde extérieur. Comme si préalablement à son existence, la réalité que nous connaissons avait été esquissée dans la roche. Mettant en scène une histoire réinventée depuis la grotte, cette vidéo montre comment le savoir informe le regard.

Chez Fayçal Baghriche, les oeuvres confrontent la mémoire et l'imaginaire et produisent des images ambigües. "Tentative pour repeindre le mur de Berlin avortée par un citoyen allemand" est une performance photographiée où l'artiste tente de repeindre en blanc les graffitis qui ornent le mur de Berlin. L'échec est éminemment subversif : l’interruption par un citoyen conduit l’artiste à effacer ses traces de "blanc", ce qui réactive une lecture politique des graffitis jusqu'alors figés en tant que témoins historiques.

Les interventions artistiques de Fayçal Baghriche jouent avec différentes formes de distanciation : la vidéo "Point, ligne, particules", adaptation du manifeste esthétique de Kandinsky "Point, ligne, plan", renvoie dos à dos les canons formalistes de l'abstraction lyrique et ceux du tag. Tournée en temps réel, cette vidéo montre l'artiste muni d'une bombe rouge attendant de réaliser une peinture dont l’aspect dépendra du mouvement et de la vitesse d’un train. Baghriche renonce à transmettre un message politique, social ou artistique au profit d'une mise en évidence des conditions de possibilité et de visibilité de son geste.

Le contexte du centre d'art est lui aussi indexé comme condition du regard. Dans la première salle d'exposition, les cimaises, fabriquées à partir de toiles tendues sur châssis et repeintes à chaque nouvelle exposition, ont accumulé au fil des ans une couche épaisse de peinture. Si le rapprochement entre la toile tendue des murs du Quartier et l'architecture a déjà retenu l'attention de plusieurs artistes, Fayçal Baghriche a simplement demandé aux techniciens de conserver les toiles enlevées lors de la précédente exposition puis de les replacer au même endroit. Des fissures, liées à la manutention, marbrent la surface murale et témoignent d'une histoire par recouvrements successifs. Fayçal Baghriche déconstruit ainsi l’idée d’un espace neutre et autonome.

Il ouvre également des brèches en montrant certains artifices qui contribuent à figer l'imaginaire collectif. "Le Message", un péplum culte dans le monde arabe, fut tourné simultanément en deux versions : l'une avec des acteurs arabes et l'autre avec des stars américaines pour une audience occidentale. À partir de ces deux versions originales, il propose de remonter les films ensemble afin de faire dialoguer les acteurs dans leurs langues respectives. Alors que l'industrie cinématographique s'appuie sur des représentations figées qui stigmatisent des publics en les séparant, l'artiste construit un espace d'échange et de rencontre. Cette version redirige l’attention du récit vers le support. Il en va de même avec certaines installations où le message se replie sur lui-même. C’est ainsi que Baghriche expose 27 drapeaux de différents pays enroulés sur eux-mêmes : seule est visible la partie rouge qui les compose, ce qui empêche de les distinguer entre eux. Ces drapeaux marquent une occupation des lieux mais ne revendiquent plus aucun territoire.

Keren Detton, directrice du Quartier, Centre d'art contemporain de Quimper



Texte de Didier Ottinger sur "Enveloppement" et "Épuration élective"

L’art de Fayçal Baghriche ressemble à ces frêles battements d’ailes de papillon, capables de déclencher des cataclysmes climatiques majeurs. Avec une apparence de désinvolture, armé des moyens les plus précaires, il s’attaque aux plus graves questions politiques et morales. Ses vidéos, dont l’ascèse visuelle et technique rappelle l’art des pionniers du cinéma burlesque, mettent en scène l’artiste en sauvageon de banlieue ou en chômeur déclamant sa tirade dans une rame de métro. Ses Enveloppements (2008) condamnent les drapeaux enroulés sur euxmêmes au mutisme patriotique, en n’exhibant que la dernière de leur couleur. Avec sa série des Épurations électives, Baghriche procède à rebours des politiques visant à sélectionner les individus sur des bases nationales ou ethniques. Son geste, qui consiste à colorer d’un bleu uniforme les pages des dictionnaires consacrés aux drapeaux du monde, produit un champ d’étoiles, qui renvoie nationalité et frontières à leur place réelle, à l’échelle du cosmos infini. Animant un globe terrestre d’une rotation rapide, il lui fait retrouver cette couleur uniforme que lui avait donnée l’idéalisme militant d’Yves Klein, la rend conforme à la vision de Paul Éluard qui la voyait «bleu comme une orange», fragile et délectable comme un fruit de Noël.



Texte de Keren Detton sur "Le sens de la marche" et "Révolutions"

Les vidéos de Fayçal Baghriche relèvent de la performance. Ses films utilisent différentes techniques de truquage, qui mettent en question l’objectivation d’un point de vue. Elles visent moins à produire des images qu'à déplacer les regards et à changer de perspective. La caméra devient un personnage supplémentaire avec lequel l’artiste peut échanger son rôle. Avec Le sens de la marche (2002) et Révolutions (2005), il interroge l'expérience physique de l'identité subjective. Il met en scène des individus pris dans un mouvement de foule et perturbe les sens de circulation. Dans un cas, il intervient au montage et diffuse le film à l'envers : l'artiste marche droit quand tout va à reculons. Il apparaît comme la seule figure raisonnable d'un monde qui tourne à l'envers. Dans Révolutions, c'est le réel qu'il met en boucle : une trentaine de complices, fondus dans la masse des visiteurs du Louvre, enchaîne les entrées et les sorties sans que personne s’en aperçoive. L’artiste disparaît derrière la caméra et filme comme s'il s'agissait d'une caméra de surveillance, en fixant l’agent de sécurité immobile. Les trucages de ces vidéos, réalisés en direct ou en différé, visent à court-circuiter les scénarios attendus en confrontant le spectateur à des mouvements contradictoires. Ces vidéos sont des pièges visuels qui ne visent pas à tromper l’observateur mais à l’impliquer dans un processus de (re) connaissance. Il en va de même dans ses autres performances, où le leurre crée les conditions d’une mise en abyme intelligible. Le leurre, la feinte, la mystification produisent un délai, un temps d’attente avant que le caractère burlesque de la situation n’éclate comme un fou rire. C’est ce moment précis, mais variable, de chute, de rupture, de «choc», où il devient possible de faire l’expérience de sa propre subjectivité et des différentes temporalités à l’oeuvre. Parce que l’on peut en rire, Fayçal Baghriche fait du leurre un véritable outil critique, et la condition même d’une théâtralité contemporaine.



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