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Ricardo Mosner
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La merveilleuse liberté qu’il épanouit dans ses carnets rejaillit avec bonheur dans ses toiles. Pendant qu’il libère les formes de toute inhibition, il entraîne les couleurs dans une folie dansante. "J’aime que la peinture garde le côté brut et spontané du dessin" déclare-t-il. Il opère une "greffe" parfaitement réussie entre la peinture ("rétinienne" comme la baptisa Duchamp) et le dessin libre et joyeux de la bande dessinée, ou l’art des graffitis de rues. Grouillements, fourmillements, foisonnements : parfois un entremêlement d’objets, comme tombés d’un cornet à dés, est prétexte à d’impressionnantes virtuosités graphiques, à la façon des poètes de music-hall auxquels on jette des rimes aléatoires et qui les amalgament immédiatement en un tout cohérent.
Argentin, d’origine polonaise, de famille juive, Mosner a beaucoup vécu en Europe, bénéficiant d’un "mélange d’influences et de cultures dans lesquelles il peut se promener à son gré". Il est collaborateur régulier de l’émission "Des Papous dans la tête" sur France Culture, et auteur tout récent d’une fresque décorative (travail collectif à quatre mains) au plafond du restaurant La Coupole.
Pour nourrir son inspiration, elle remonte aux sources, consulte les archives de la seconde guerre mondiale, contemple des photos d’enfants exterminés. Poilus couleur feuilles mortes, soldats mutilés, faits de bois peints et grattés, série des "tombés gefallen" en fil de fer et lambeaux de tissu, portraits d’inconnus, "surgis de l’ombre", visages graves aux grands yeux fixes ou mélancoliques, à la façon des portraits-médaillons du XIXe siècle, "Mémorial" (huile sur calque et raphia), assemblage de portraits d’enfants aux traits dilués, comme rongés et uniformisés par l’anonymat, grossièrement cousus ensemble, émergeant des cauchemars de l’histoire, luttant contre l’oubli… Sans aucun pathos, avec des moyens d’une surprenante simplicité, le plus souvent sur de petits formats, Béatrice Turquand d’Auzay suggère le pathétique et touche à l’émotion la plus authentique. Tel ce cadavre de "boche" en poupée de chiffon effiloché, liège et bouts de ficelle, cloué sur un socle de bois brut, aussi dérisoire qu’une bogue de châtaigne roussie ou qu’un cadavre de moineau . L’artiste recourt aux techniques mixtes les plus inventives : caséine (protéine du lait), pâte à bois, raphia, fil de fer, broderies, papier kraft, fragments découpés, présentés comme des reliques. Savant mélange d’ingénuité et de savoir-faire, Béatrice Turquand pratique ce qu’on pourrait appeler un art du frémissement. La fragilité et la modestie apparente des matériaux mis en œuvre évoquent avec une force singulière la fragilité des destinées humaines.
Xavier Bureau