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André Kertész

Jeu de Paume, Paris

Exposition du 28 septembre 2010 au 6 février 2011


André Kertész
André Kertész, Satiric Dancer, 1926 - Reproduction d’après négatif original - Médiathèque de l'architecture et du patrimoine, Paris

André Kertész (1894-1985) est aujourd’hui, 25 ans après sa disparition, un photographe reconnu internationalement, dont chacun a en tête quelques images marquantes, mais il n’a pas encore trouvé la place qu'il mérite si l’on considère ses apports personnels au langage photographique du vingtième siècle. Sa carrière, qui s’est étendue sur plus de soixante-dix ans, a été chaotique, et sa longévité s’est doublée d’une constante acuité créatrice, ce qui est exceptionnel mais n’a pas favorisé la compréhension immédiate ou rétrospective de son oeuvre.

La présente exposition veut donner, pour la première fois, une vision extensive et équilibrée de l’oeuvre de Kertész, en apportant des éléments nouveaux et en rassemblant, pour la première fois aussi, un nombre important de tirages d’époque (les deux tiers des 300 photos présentées). L’exposition, et le catalogue qui l’accompagne, ont été réalisés avec le concours de la Fondation André et Elisabeth Kertész (New York) et de la Médiathèque de l’architecture et du patrimoine (Paris), détentrice de la donation Kertész au ministère de la culture.

Une première investigation fut menée de son vivant pour l’élaboration de la première exposition rétrospective en 1985 ; le livre Ma France (1990), rendait hommage à sa donation française, et célébrait ses périodes parisiennes (1925-1936 et après 1963), et le récent catalogue de l’exposition de la National Gallery of Art, Washington (2005), a apporté beaucoup de précisions circonstancielles et des analyses nouvelles. Avec cette exposition rétrospective, nous avons tenté de reconstituer l’oeuvre global de Kertész dans son homogénéité et sa continuité tel qu’il l’avait conçu, au plus près du déroulement de sa vie, en exploitant au mieux les documents d’archive.

André Kertész
La Plaque cassée, 1929 - André Kertész - Épreuve gélatino-argentique, tirée dans les années 1970 - 20,3 x 25,2 cm - Courtesy Attila Pocze, Vintage Galéria, Budapest

Dans un parcours chronologique et linéaire qui reprend les périodes de sa vie créatrice, ponctué d’autoportraits qui marquent l’entrée de chaque espace, nous avons effectué des regroupements thématiques par « cellules » mettant en valeur des particularités de l’oeuvre : une pratique personnelle (la carte postale photographique, les Distorsions), son implication dans l’édition (le livre Paris vu par Kertész, 1934), des recherches créatives récurrentes (les ombres, les cheminées) ou l’expression plus diffuse des sentiments (la solitude). Des moments jusqu’alors délaissés ou inexplorés sont valorisés (l’activité de soldat en 1914-1918, la période new-yorkaise et les polaroids des dernières années) et cette exposition met particulièrement l’accent sur la genèse du photo-reportage à Paris, à partir de 1928 et sur la diffusion de ses images dans les médias, dont il avait fait un métier. Seront ainsi présentés de nombreux exemplaires des magazines VU, Art et Médecine, Paris Magazine, et les diverses parutions de son reportage sur la trappe de Soligny, avec les prises de vue originelles de Kertész.


André Kertész

La vie de Kertész s’est déroulée successivement dans trois pays, et il a souffert d’être confronté à trois cultures et à trois langues : né en Hongrie en 1894, il commence à photographier en 1912, participe à la guerre 1914-1918 mais à l’issue de celle-ci ne trouvant pas de réponse à sa vocation, il décide, en 1925, de s’installer à Paris. Il y devient rapidement l’un des principaux acteurs de l’avant-garde photographique (la fameuse « Fourchette » de 1929, l’entrée de l’atelier de Mondrian en 1926, les « Distorsions » de nus en 1933), tout en se tenant à l’écart des mouvements artistiques. Il y est aussi, presque à son insu, l’initiateur du reportage photographique à partir de 1928 et se distingue par une attitude photographique plus émotive qu’objective, préférant à l’enquête sociale une prospection visuelle dont la motivation est d’abord affaire de sentiment.

Parti pour les États-Unis en 1936, il ne parvient pas à renouveler sa démarche dans le photojournalisme ou la mode, avant le conflit mondial qui le met à l’écart en tant qu’étranger. En 1947, il accepte un emploi rémunérateur mais ennuyeux pour le magazine House and Garden. Ce n’est qu’au moment de la retraite, à partir de 1962, que Kertész peut réinvestir son oeuvre antérieur, retrouve ses négatifs anciens restés en France, et accède peu à peu à une reconnaissance internationale. Le développement de l’histoire de la photographie, l’éclosion du marché des épreuves, la multiplication des expositions le font bénéficier d’une embellie générale propice à la revalorisation de son passé. Ce contexte l’incite également à redoubler sa quête personnelle d’images rares et signifiantes, soit à l’occasion de déambulations solitaires dans la ville, soit en guettant depuis son appartement du 12e étage, qui donne sur Washington Square.

Citoyen américain depuis 1944, il crée à New York après le décès de son épouse en 1977, la Fondation André et Elisabeth Kertész ; mais resté parisien de coeur, il lègue à la France ses négatifs et ses archives, en 1984 (Médiathèque de l’architecture et du patrimoine).

Les contingences d’un parcours atypique à une époque où la photographie ne jouissait pas d’une mise en valeur artistique, la dispersion géographique et temporelle des oeuvres, accentuée par le partage entre New York et Paris, ont rendu difficile l’analyse historique et esthétique de l’oeuvre de Kertész ; d’autant que sa singularité poétique, volontaire et résolue, constamment soulignée par les commentateurs, en faisait un objet étrange, en marge du photojournalisme, bien qu’à l’origine de celui-ci. Le photographe lui-même avait entrepris de brouiller les cartes avec son livre Soixante ans de photographie, 1912-1972, comme pour signifier la vanité d’un repérage a posteriori. Pourtant, ce rebelle solitaire s’est prêté de bon gré aux entretiens et conservait soigneusement tous ses papiers personnels.

Conscient des contraintes professionnelles de la photographie, confronté à celles-ci toute sa vie durant, André Kertész se conduit plutôt en « amateur », revendiquant lui-même cette position, ce qui lui permet d’affirmer la primauté du sentiment, de l’affectivité, des critères personnels dans une quête autonome qu’il compare à un journal intime : « Ma photographie est vraiment un journal intime visuel [...]. C’est un outil, pour donner une expression à ma vie, pour décrire ma vie, tout comme des poètes ou des écrivains décrivent les expériences qu’ils ont vécues ».

Kertész n’est pas un illustrateur, qui rechercherait des thèmes documentaires adaptés aux demandes de la presse, il s’implique personnellement, même lorsqu’il est l'un des principaux acteurs de la naissance du reportage social vers 1930 : « Je ne documente jamais, j’interprète toujours avec mes images. C’est la grande différence entre moi et beaucoup d’autres. [...] J’interprète ce que je ressens à un moment donné. Pas ce que je vois, mais ce que je ressens ». Entre 1912 et 1985, Kertész garde une profonde continuité dans sa démarche bien que le style change, que les moyens techniques s’adaptent (les téléobjectifs des années 1960) ou que les circonstances amènent de nouveaux points de vue (De ma fenêtre sera le titre d’un de ses livres) : « Je n’ai jamais simplement "fait des photos". Je m’exprime par la photographie. » C’est à propos de Kertész que Roland Barthes (La Chambre claire, 1980) évoque la possibilité d’une « photographie pensive », une catégorie de photographie qui donne à penser, tout en s’appuyant sur une réalité détectée par le photographe. C’est cette faculté d’évocation de l’inconnu, et de renouvellement de la sensation intérieure produite par une image qui fait, pour une part, l’originalité de Kertész : « On a dit que mes photos "semblent plutôt sortir d’un rêve que de la réalité". Il y a une association inexplicable entre moi et ce que je vois ».

L’exposition du Jeu de Paume restitue la vocation poétique de la photographie de Kertész, comparable à l’intuition d’un écrivain, tel son compatriote et ami Sandor Marai qui écrivait : « J’espérais simplement qu’un jour… j’aurais l’occasion de dire en une ligne ce qu’aucun autre ne saurait dire à ma place » (Sandor Marai, Confessions d’un bourgeois, 1934).

Michel Frizot, Annie-Laure Wanaverbecq, commissaires de l’exposition



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