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Portraits de la pensée |
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Palais des Beaux-Arts de LilleExposition du 11 mars au 13 juin 2011Sur le thème de la figure du philosophe au siècle d’or, 50 chefs d’oeuvre des plus grands maîtres du XVIIe siècle parmi lesquels Diego Velasquez, Luca Giordano, José de Ribera, Salvator Rosa, entre l’Espagne et l’Italie, mais aussi Hendrick Ter Brugghen, Paulus Moreelse et Dirck van Baburen de l’école caravagesque d’Utrecht. "Comment peindre la pensée, et pourquoi ?" Elle est, par essence, la manifestation de l’invisible, tout comme l’activité méditative, la réflexion philosophique, le sentiment de la foi, la présence cachée du divin. Tandis que ces manifestations donnent lieu à des pratiques collectives, elles s’incarnent tout autant dans la singularité d’une vision, d’une démarche conceptuelle, d’une recherche spéculative, d’une discussion, voire d’une interlocution avec une effigie emblématique, un attribut révélateur. Ce champ de l’expression de la pensée semblerait difficile à cerner dans sa traduction plastique tant les occurrences sont nombreuses, fugaces ou traversées par d’autres dynamiques. La pratique artistique nous a légué un corpus d’images, tout particulièrement de portraits, réalisant l’incarnation d’une pensée à l’état pur, sans objet précisément défini, qui se saisit dans un chemin de vie et se voit dans toute sa vitalité intérieure à travers l’expression d’un visage, le geste qui l’accompagne, l’attribut qui sert de support et de moteur, la lumière qui révèle l’énergie issue de l’intérieur ou comme une inspiration venue de l’extérieur, l’attitude qui dénote le nécessaire engagement physique de toute pensée véritablement incarnée, jusqu’au vêtement qui, dans l’accompagnement de ses traits d’expression, symbolise le pouvoir, la sagesse, ou le dénuement et la liberté du sujet. L’ensemble de ces conditions physiques de l’expression d’une pensée, tantôt instantanée et fulgurante, dans la jubilation de la trouvaille conceptuelle, tantôt surgie de profondeurs intemporelles, ont trouvé leur incarnation dans les figures de philosophes, de mendiants, de savants, de poètes, de sibylles, de saints et de saintes voués à la méditation la plus intense et la plus étrangère à leur enveloppe charnelle. Suivant les recommandations spirituelles de la Réforme catholique, qui prônait comme valeurs suprêmes l’équilibre et la relation déjà dialectique entre la richesse intérieure et la pauvreté extérieure, Diego Velasquez, José de Ribera Luca Giordano se sont engagés dans un programme sériel de philosophes engagés dans une errance sereine et de vagabonds nourris d’une tranquille philosophie de l’existence. Leur travail a pu servir d’exemple et de figure de référence à des individus de toutes sortes, riches ou pauvres, ainsi amenés, à travers la peinture, à croiser le regard de ces personnages et se faire arrêter par leur geste ou leur attitude. Comme la figure tutélaire du Démocrite chrétien, ces cycles de portraits manifestent l’omniprésence et la vitalité de la philosophie stoïcienne, tant dans son expression pure, tirée de la lecture des textes antiques, dans ses transformations en adages et proverbes populaires que dans sa contamination par absorption de la pensée chrétienne de la contreréforme. Fort de ce programme philosophique et spirituel, l’acte de penser est sensé habiter l’homme à tout instant sur le chemin de sa vie. Le corps pensant se fait sous la forme d’un portrait, réceptacle de l’invisible, marqué par les traits de la plus pure visibilité. La culture humaniste, qui place l’homme au coeur de sa destinée, sait prendre ses distances avec la mise en image des récits bibliques, des vertus antiques dans leurs traductions canoniques. S’étant beaucoup appuyée au XVIe siècle sur le paysage dans sa dimension cosmologique et dans l’expression de son insaisissable variété, elle privilégie au XVIIe siècle dans l’ensemble de l’Europe, en particulier dans les milieux animés par une active pensée de réforme, la figure comme un portrait à la fois particulier et universel, tandis que dans le milieu de la réforme protestante, plutôt que la figure comme exemple, ce sont les accumulations symboliques d’objets, dites improprement « natures mortes », qui portent ce commun et nécessaire sentiment de la vanité de la possession de toute chose, savoir comme richesse. Aujourd’hui, 50 de ces portraits surgis de l’effervescence spirituelle et philosophique qui se propage durant ce siècle d’or de Madrid à Naples puis à Rome jusqu’à l’Utrecht septentrional, font apparaitre l’usage et la nécessité fonctionnelle de ce caravagisme fait de réalisme à l’acuité des accents et d’un ténébrisme de pénétration, et mettent en concordance la peinture dans son style et sa manière avec la fonction qui est sa première raison d’être.
La pièce maîtresse du vidéaste américain Bill Viola, consacrée à St. Jean
de la Croix, Room for St. John of the Cross (1983) accueillera le visiteur
au centre d’un temple pour le plonger dans d’autres expériences de
méditation, pathétique mais le plus souvent rieuse et jubilatoire.
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