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Markus RaetzEstampes, sculptures |
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BnF, ParisExposition du 8 novembre 2011 au 12 février 2012Exposition Markus Raetz, BnF, Paris 2011/2012 "Cette exposition est l’occasion de présenter la richesse et la diversité de l’oeuvre gravé de cet artiste majeur de la création contemporaine qui vient de consentir une généreuse donation, destinée à compléter les collections de la Bibliothèque nationale de France." déclare Bruno Racine, président de la BnF. La figure et le visage, le paysage, les mots, la trame et la trichromie, la géométrie et l’amour, sont autant de thèmes chers à Markus Raetz. Les 200 pièces de l’exposition font découvrir l’oeuvre gravé, rarement montré, de cet artiste suisse polyvalent. Peintre, sculpteur, photographe et dessinateur, il aime à créer des oeuvres d’art où la métamorphose et l’anamorphose occupent une place centrale, jouant des confusions entre réel et visuel. Markus Raetz réalise depuis plusieurs décennies, des installations, des photographies, des sculptures qui ont pour point commun d’interroger et de déstabiliser notre façon de regarder. Il aime à renverser les couples plein/vide, reflet/réalité, courbe/contre-courbe, ombre/lumière. Cette recherche le conduit à des anamorphoses, des jeux de miroir, explorant l’ambivalence de la vision, la modification de la perception, selon le point de vue. Il appartient au spectateur, par son regard, de (re)donner sens à la forme que l’artiste a déconstruite et, comme il le dit lui-même : "Ce qui m’importe, c’est le mouvement qu’on fait autour de l’oeuvre, les différentes perceptions qu’on a en fonction de notre évolution dans l’espace". Le mouvement et la perspective confèrent au travail de Markus Raetz un caractère expérimental, ludique et métaphysique à la fois. L’exposition riche de nombreuses estampes, dessins, carnets et une dizaine de sculptures, met plus particulièrement en lumière l’extrême diversité de son oeuvre gravé, car Markus Raetz pratique et fait siennes toutes les techniques de l’estampe (cliché-verre, héliogravure, pointe sèche, burin, eau-forte et aquatinte, pochoir ou encore impression à la ficelle). Le parcours est scandé par de grands ensembles gravés : le portfolio Rietveld, les gravures en trichromie du Dreifarben-Mappe, les planches pour l’illustration d’Impressions d’Afrique de Raymond Roussel, les aquatintes de NO W HERE. Un film, réalisé par Iwan Schumacher, est également diffusé en fin de parcours et emmène le visiteur dans l’intimité de l’atelier de Markus Raetz à Berne.
L’exposition est accompagnée d’un catalogue bilingue français-anglais et de l’édition d’une
estampe spécialement créée par l’artiste pour l’occasion, intitulée Ring.
Les deux premières salles nous font pénétrer dans ce qui fait l’essence de la gravure, les diverses techniques de l’estampe, car Markus Raetz pratique et fait sienne toute technique permettant d’imprimer : tampon caoutchouc, gaufrage, pointe sèche, burin, eau-forte et aquatinte. La pratique de l’estampe chez Markus Raetz répond à un besoin d’expérimenter de nouveaux moyens de création. Il s’est familiarisé avec toutes ces techniques afin d’utiliser pour chaque projet celle qui convient le mieux. - Les débuts A Amsterdam, au début des années 1970, Markus Raetz qui n’a pas encore 30 ans, approfondit sa pratique de l’eau-forte à l’Académie Rietveld. Il s’exerce plus particulièrement à l’eau-forte en noir et blanc et édite un portfolio de 15 planches réalisées à l’Académie : Fliegende Hose (Pantalon volant), Vol de langues, Schnelles Sujet (Sujet rapide). Dans ces oeuvres proches du courant Dada (Picabia), du surréalisme et de Fluxus dont son compatriote Dieter Roth fait partie, Markus Raetz cherche à représenter l’irreprésentable : le vol, la vitesse, la lumière … Il est aidé pour cela par l’excellence et la maîtrise de la technique : il prépare des plaques de zinc au papier de verre pour donner de la matière, fait des réserves au vernis (asphalte ou bitume), travaille au brunissoir pour obtenir des blancs, fait des reprises à la pointe sèche pour donner des accents. - La couleur Fruit de sa première collaboration avec l’imprimeur Peter Kneubühler à Zürich, Dreifarben-Mappe, (Album 3 couleurs, 1977) est l’aboutissement des recherches sur la trichromie, la trame au trait, la trame au point (Salvador Dali, Alain Jacquet, Sigmar Polke, par exemple, ont aussi travaillé dans ce domaine). Trois plaques gravées (une pour chaque couleur fondamentale : rouge, bleu, jaune) sont imprimées successivement, dans un certain ordre, sur la feuille de papier : les trames se croisent et se superposent parfois. Markus Raetz fait vibrer le sujet, le décompose même, et nous oblige à le re-construire en clignant des yeux ou en prenant de la distance comme dans Autoportrait (gravure au criblé), Vue du balcon, Homme regardant son ombre (le noir est obtenu par la superposition des trois couleurs). Pour l’oeuvre Nach Elvis, le point de départ est une carte postale en noir et blanc qui est ensuite décomposée en trois couleurs : à bonne distance, la superposition des trois couleurs sur la rétine fait apparaître l’image en noir. - La Figure Lenteur et patience du graveur : nombreux sont les essais et les ajustements avant de parvenir à l’état définitif. Deux séries complètes consacrées au visage en font la démonstration. Dans Profil III (1982) gravé à la pointe sèche, douze états sont nécessaires pour modeler ce profil aux traits si classiques que chacun peut y reconnaître un être proche. Au fil des premiers états le cuivre est coupé, réduit de près d’un tiers, pour cadrer au plus près le visage, et la lumière peu à peu en gomme les contours. Pour la réalisation de l’estampe Person D de la série Attentat à l’acide, l’acide est posé au pinceau et mord directement le cuivre : en huit étapes, on peut suivre le modelage du visage entre lumière et ombre. Le regard et les lèvres changent d’expression au fur et à mesure que l’acide fait son office sur le métal, ronge, lisse ou polit le visage, l’absorbant dans l’obscurité. Seuls, alors, luisent encore les yeux, des yeux en amande semblables à ceux des bouddhas de pierre dure. Markus Raetz fait également oeuvre de sculpteur. Pour lui, il n’y a pas de barrière entre la gravure et la sculpture : graver la plaque de cuivre est aussi une manière de sculpter. La gravure au burin est particulièrement proche du geste du sculpteur, et Markus Raetz s’entraîne, au prix d’un douloureux effort, à "pousser" cet outil exigeant qu’est le burin affûté. Pour ce type de gravure, l’ombre et la lumière sont fonction de l’épaisseur du trait gravé qui modèle la forme. Quand les tailles ne sont pas encrées, mais seule la surface de la plaque, elles apparaissent en blanc, comme dans un négatif photographique. Markus Raetz aime à joindre sur la même feuille un tirage de chacune de ces deux manières d’imprimer comme dans Wellen (Vagues), ce burin sur cuivre imprimé à la demande par l’atelier de la Chalcographie du musée du Louvre qui l’a commandé à l’artiste dans le cadre de son programme d’éditions contemporaines.
Deux salles traitent du domaine de la vision, de l’espace et de la perception. Ces thématiques reflètent bien la fascination qu’a Markus Raetz pour le passage de la deuxième à la troisième dimension, puis de la troisième à la quatrième dimension et sa proximité avec les travaux de Marcel Duchamp sur l’imperceptible et le terme d’"inframince". Deux sculptures font le lien entre les deux espaces : Fernsicht, petit bonhomme qui, avec des jumelles, regarde au loin, et le Zeemansblik, simple morceau de tôle, non peint, qui "reflète" le paysage alentour, variant selon l’éclairage. Le mot néerlandais "Zeemansblik" a un double sens : "tôle de marin" et "vue de marin". Outre la vue, tous les sens sont convoqués dans notre perception du monde et ils sont nécessaires pour appréhender le travail de Markus Raetz. L’artiste figure même ce qui se passe dans notre cerveau dans un ensemble d’oeuvres : Kluge Kugel (Boule intelligente), Sinne (Sens), Sehen (Voir), Sehfeld (Champ de vision). Dans Views (Sichten, Vues), on retrouve les deux cônes de la sculpture Doppelkonus représentant le champ de vision d’un profil humain. Ces cônes rappellent le faisceau lumineux d’une projection filmique, tout autant que les schémas des manuels de perspective du XVIIe siècle. Phénomène de la perception dans Tag oder Nacht, (Jour ou nuit, 1998), on peut contempler les deux fenêtres de jour ou de nuit, mais pas les deux à la fois. Encore une gymnastique de l’esprit, du regard, quand la focalisation de l’oeil sur l’une des deux fait disparaître l’autre. Dans les mystérieuses lucarnes (Luke), il faut lever la tête pour voir au travers et au-delà de l’encadrement qui découpe un rectangle de ciel bleu, une percée de lumière.
Entrons dans le paysage, l’archétype du paysage. Avec la suite somptueuse des sept grands paysages de NO W HERE, signifiant à la fois "maintenant ici" et "nulle part", liberté nous est donnée de nous remémorer des paysages familiers ou d’inventer d’autres lieux. Dans ces aquatintes en une à trois couleurs, réalisées dans l’atelier de Peter Kneubühler en 1991 et librement dessinées au pinceau avec morsure directe à l’acide, ciel et terre apparaissent, déclenchant l’illusion d’un paysage.
L’ensemble Ombre, de taille plus modeste, est réalisé à partir de peintures au pinceau sur plaques
de verre (dont on peut voir des exemples en vitrine). On est surpris d’y trouver un plat de spaghettis
ou une assiette de petits-fours qui se contemplent comme des paysages, parmi les autres. Un choix
de carnets, contenant croquis et notes en rapport avec les estampes et dans lesquels Markus Raetz
dessine paysages de montagnes, plaines et côtes maritimes est également présenté au visiteur.
Pour faire la transition avec la partie suivante, le Promontory of noses (Promontoire des nez), n’est
autre que la silhouette du profil de l’artiste : Markus Raetz s’est penché au-dessus de la plaque photosensible
qui a recueilli l’ombre de son profil, semblable à la ligne de crête des montagnes entre
Berne et Olten, paysage dont le titre se réfère au Tristram Shandy de Laurence Sterne qui lui a inspiré
plusieurs estampes.
Comme tout artiste, Markus Raetz ne vit pas sans référents, sans une vaste culture artistique, littéraire et sans réfléchir l’écho du monde qui l’entoure : clins d’oeil à Marilyn, à Elvis, au film policier, renvois à René Magritte, Marcel Duchamp et aux surréalistes. Son oeuvre fait très souvent référence à certains de ses écrivains favoris : Robert Walser, Raymond Roussel ou Laurence Sterne. Pour la première traduction intégrale en allemand du livre Impressions d’Afrique de Raymond Roussel, Markus Raetz a créé 14 eaux-fortes, non pas des illustrations littérales, mais, à la manière de Roussel dans Comment j’ai écrit certains de mes livres, des personnages à tête de carte de l’Afrique inspirés d’une caricature du dirigeant congolais Patrice Lumumba après sa mort en 1961, un portrait de Roussel en boules de billard, un jeu de mots "Défense d’y voir". Du roman Tristram Shandy, de l’écrivain anglais du XVIIIe siècle Laurence Sterne, Markus Raetz retient le "Flourish", ce moulinet que dessine dans l’air avec son bâton le caporal Trim lorsqu’il parle de la liberté, ligne serpentine imprimée en plein texte que l’on peut voir en vitrine, dans une édition conservée à la BnF. Marcel Duchamp et Erik Satie sont également présents par l’intermédiaire de photographies de Man Ray que Markus Raetz a retournées : il nous montre Duchamp et Satie de dos, sur une couverture rose pour "Prélude à la Rrose (quoi ?)", partition musicale de Gavin Bryars, éditée à l’initiative de Jacques Caumont pour le 100e anniversaire de la naissance de Marcel Duchamp. La plus belle chose au monde est toujours l’amour comme le prouve la délicate série intitulée Paar : des couples, à peine esquissés par deux traits, gaufrages de deux fils de fer montés sur cartons, déclinés en quinze variantes sur papier ou carton, parfois peints ou retouchés avec de la couleur. On peut sans doute y voir un clin d’oeil de Markus Raetz à L’Immaculée conception, livre écrit en commun par André Breton et Paul Eluard en 1930.
Dans la section suivante, les phénomènes de la vision, de la perception, du point de vue sont à nouveau évoqués. C’est l’oeil du spectateur, lorsqu’il la regarde, qui contribue à créer l’oeuvre toute entière. En tournant autour des sculptures, leur forme change, se transforme : au grand étonnement du visiteur, la pipe devient fumée (Nichtpfeife), et YES se lit NO (Crossing) : il faut alors continuer à tourner pour comprendre ce prodige. Ces sculptures reflètent l’importance que Markus Raetz donne au travail sur les mots, les jeux de miroirs, la forme des lettres, les homophonies ou encore le passage d’un mot à l’autre par simple changement d’une lettre. Dans le burin Croisement, le regard s’est immobilisé entre les deux extrêmes TOUT et RIEN, et il ne lit plus ni l’un ni l’autre, mais un état intermédiaire possible dans le passage d’un mot à l’autre, dans l’espace entre ces deux mots antinomiques. On trouve encore le jeu avec les mots dans Dieses & Jenes, qui signifie à la fois Ceci et cela. Les thèmes du reflet, du miroir sont présents dans les trois grandes planches de Reflexion pour lesquelles Markus Raetz, en sculpteur, agence sous la lumière zénithale, un bras, une main et un miroir rond portant le dessin d’un visage. C’est ce visage, réfléchi par le miroir, qui s’inscrit dans un rond de lumière au centre de la planche obscure Reflexion III. Ces estampes ont été réalisées en 1991 dans l’atelier de Crown Point Press à San Francisco avec un matériel très simple (miroir) et une technique très ingénieuse qui tient à la fois du photogramme d’Henry Fox Talbot et du rayogramme de Man Ray : l’artiste interpose un objet entre la lumière zénithale de l’atelier et une plaque couverte de gélatine photosensible sur laquelle s’impressionne l’ombre de celui-ci. Dans la sculpture Looking Glass, le miroir accueille le profil venu de la ligne en fil de cuivre fixée sur le mur opposé. Présence du miroir encore dans l’estampe ME WE : le reflet du mot ME gravé sur une plaque de verre se lit WE, le passage se fait de "moi" l’artiste, à "nous", ensemble avec lui. La dernière salle est consacrée à la géométrie, aux mathématiques, qui accompagnent l’oeuvre de Markus Raetz depuis ses débuts. Il faut contempler longuement les Opaques transparents : deux parallélogrammes en fil de fer qui, en tournant dans l’espace, prennent du volume ou se distordent. Cette sculpture mobile en trois dimensions est venue après les Zwei Körper (Deux figures du même volume) réalisées en 1999, empreintes sur carton noir, comme des instants arrêtés de la sculpture en mouvement. De nombreuses études mathématiques ont précédé le dessin du treillage Vlechtwerk (1972) : copie héliographique imprimée sur une machine pour plans d’architecte en raison du format du dessin (1,50 mètre x 1 mètre). Travail sur le maillage, la trame, Akt (Nu) impression jet d’encre (2003) est la traduction en trichromie d’un polaroïd en noir et blanc, oeuvre commune du photographe suisse Balthazar Burkhard et de Markus Raetz en 1978 : de près on distingue les trois couleurs, rouge, bleu, jaune, mais de plus loin notre oeil saisit du noir, la superposition des couleurs s’étant formée sur la rétine. Pour clôre l’exposition, la dernière sculpture de Markus Raetz, Ring, est mise en valeur. C’est un hommage au Ruban sans fin (1935), sculpture de Max Bill, inspirée du ruban de Moebius, dont la figure topologique (comme le tore) hante les carnets de l’artiste depuis toujours. Le passage de la deuxième à la troisième dimension est accompli : voilà cet anneau Ring représenté sous deux formes : en trois dimensions, fonte patinée noire, et en estampe, gravé au burin, imprimé à la perfection sur chine appliqué par Michèle Dillier. Ce Ring est tiré à 99 exemplaires pour les exemplaires de tête du catalogue bilingue français-anglais édité à l’occasion de l’exposition. A la sortie de l’exposition, un film, réalisé par Iwan Schumacher en 2007 emmène le visiteur dans l’intimité de l’atelier de Markus Raetz à Berne.
Le visiteur est alors invité à revenir sur ses pas dans l’exposition pour se laisser surprendre encore
et encore par les subtilités et l’esprit de l’oeuvre de cet artiste extrêmement singulier.
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