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Jérôme BorelScope |
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3e Rue Galerie, Paris/MarseilleExposition jusqu'au 28 mai 2011La 3e Rue Galerie inaugure un nouveau mode d’exposition : un même artiste présenté simultanément sur deux lieux et deux villes différentes, Marseille et Paris. Sur Paris, la galerie, par son format intime, s’est imposée comme un espace « cellule », que l’artiste aménage de façon à plonger le public dans un état émotionnel et psychique particulier. Ce que la vitrine parisienne dévoile, encadre, soumet au regard, est à chaque fois une nouvelle pièce – partie d’une oeuvre artistique plus large, mais aussi et surtout, lieu physique et symbolique dans lequel chacun est invité à entrer. Comme il a commencé à le faire au Pavillon, à Pantin, pour l’exposition « Ornement », Jérôme Borel continue ici à jouer avec les attentes du public des galeries en détournant l'éclairage des oeuvres au profit d’objets du quotidien. Ces objets, volontairement désuets, ont été disposés de façon à recréer l’atmosphère intimiste des boudoirs d’antan. Au centre de la pièce, il y a un fauteuil, chaleureusement illuminé par une petite lampe de lecture. L’assistante de la galerie, habituellement cachée derrière un bureau, est assise dans le fauteuil qui fait face à la vitrine et à la rue. Les toiles, maintenues dans une relative pénombre, pourraient ainsi paraître des meubles de plus, des arrière-plans, si leur présence n’était subtilement indiquée et rehaussée par la couleur des murs choisie expressément. En anglais, "scope" signifie en première acception : champ, portée d'une question ou d'une application ; un second sens réfère à la lunette d'un fusil, c'est-à-dire à l'arme à feu, l'arme à tuer… Nous vivons et mourons dans le regard de l'autre. De ce regard que nous portons sur ce que nous voyons, et selon les conventions en jeu, "Scope" apparait comme un paradigme. « Comment produire de l’image face à la démultiplication exponentielle des images ? Comment inventer une réalité pour faire face à la profusion des représentations des réalités ? »(1) Avec « Scope », Jérôme Borel poursuit son travail de restitution par la peinture du choc initial produit par des sensations visuelles, des sensations du type de celles qu’engendrent le cinéma et la télévision. « Nous ne regardons plus tellement les images, nous sommes beaucoup plus sensibles aux stimulations rétiniennes. (…) De ce point de vue, mes tableaux sont faits avec cette sensation intérieure, et non pas à partir d’images. »(1) Et pour celui qui regarde, la forme qui émerge sur les toiles de Jérôme Borel agit en peinture comme les images subliminales au cinéma : elle est sue sans être vue ; elle ne s’inscrit pas en tant que forme dans la rétine, mais elle impacte directement le cerveau de sa signification. Le choix de « SCOPE » comme titre de cette exposition fait d’abord référence au terme anglais qui en première acception signifie champ, portée d’une question ou d’une application ; un second sens réfère à la lunette d’un fusil, c’est-à-dire à l’arme à feu, l’arme à tuer ; et puis, « a scope », c’est aussi un télescope et « to scope », c’est parcourir du regard. En français, scope est un mot incomplet, un suffixe qui n’a de sens qu’accolé à un mot racine. Il n’est pas difficile pourtant d’imaginer ce mot racine. Et que l’on pense à microscope, ou à cinémascope, l’on pense dans tous les cas, à une puissance de vue. Voir ce qui ne peut être vu. Voir au-delà du visible. Car « il appartient aux traces d’être souvent inapparentes, et elles sont toujours le legs d’une assignation à peine pressentie. »(2) Et il appartient à l’artiste de répondre à cette assignation et de rendre à la trace son « illustre passé. »(3) « En cinéma, seul le montage peut donner forme à la coexistence de l'image artistique et de l'horreur du monde. C'est cette coexistence qui est source d'émotion et qui rend compte de la vraie nature de l'homme, debout, lucide face au monde. »(2) En peinture, le montage se fait au moment de l’exposition, par le choix des toiles, leur combinaison et leur présentation dans l’espace de la galerie. L’impact de l’oeuvre naît de « la fraternité des métaphores »(2) ainsi créées. Pour cette exposition comme pour les précédentes, Jérôme Borel va se soucier de faire pénétrer le spectateur dans son « aménagement cérébral »(4). Un aménagement tel que l’a déchiffré Philippe Dagen : « Calculé au millimètre par l’artiste, qui a aussi choisi la couleur des murs, l’accrochage est d’une efficacité impeccable : l’exposition de Jérôme Borel est une machine visuelle qui prend possession du regard et place le spectateur dans un état d’inquiétude et de malaise, sans qu’il y ait pour autant la moindre image violente, le moindre expressionisme. En 2007, à la Maison rouge, à Paris, il avait déjà réalisé un tel dispositif psychique. Il apparaît ainsi de plus en plus nettement que se développe ici une oeuvre cohérente, réfléchie et extrêmement sensible à notre présent. »(5)
(1) Jérôme Borel, Roman, isthme éditions, Paris, 2006 |
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