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Farah Atassi et Élodie Lesourd

Les églises, Chelles

Exposition du 22 mai au 17 juillet 2011




L'exposition de Farah Atassi et Élodie Lesourd met en tension leurs démarches picturales, dans la relation qui apparaît entre elles comme dans celle que chacune tisse avec les espaces particuliers du centre d'art. D'un mur à l'autre de l'espace d'exposition, ces deux présences se côtoient, s'affranchissent d'une lecture trop immédiate.

À l’image du tracé d'un graphique, d’une ligne de visibilité née d'une articulation entre abscisses et ordonnées, cette exposition propose une approche différenciée de leurs peintures, entre verticalité et horizontalité.

Les peintures de Farah Atassi sont des surfaces pelliculées et dressées, dans lesquelles la matière picturale fait son lit et à partir desquelles le regard peut effeuiller les épaisseurs fines pensées comme autant de seuils de visibilité. Ces espaces anthropomorphiques, (dé)posés à même le sol, se donnent dans un face-à-face avec le regardeur. L'oeil est mis à l'épreuve par un travail d'accommodation sur l'étendue de la toile, immédiateté faite de strates verticales ajoutées, ressentie comme une sorte de « Time Machine » propre à l'artiste. Repentirs, retraits et pelliculage de la surface viennent construire et (dé)voiler les espaces déshabités de Farah Atassi. L'évocation d'univers tarkovskiens ou post-fonctionnalistes conforte les conditions requises selon elle pour poser sa pratique picturale : atmosphère qu'elle a maintenue dans l’exposition, rejouant l’atelier par la présence d’un éclairage au néon.

La présence préalable d'une relation à l'image qui permet à Farah Atassi d'envisager la possibilité de la peinture, Élodie Lesourd la partage, conjuguant, au sein d'un indifférencié, émergences et apparitions d'espaces autrement déshabités. Dépassant les délimitations conventionnelles sur lesquelles se construisent nos lectures de l’art, Élodie Lesourd souligne des porosités de niveau entre ce qui se voudrait un haut et un bas de la présence artistique (l'oeuvre et son image – reproductibilité chère à Walter Benjamin), une césure horizontale entre culture et sous-culture (l'art et le rock), entre abstraction et hyperréalisme. Elle joue de distinctions appréciatives sur lesquelles se fondent d’autres seuils de visibilité, désignant une perméabilité au-delà de laquelle se dessinent les contours de l'altérité, les frontières d'un crépusculaire.

Sa pratique de la peinture se fait à main levée ce qui peut être en soi et potentiellement une forme fragilisée de mainmise. Sa maîtrise est cependant évidente et elle vient dialoguer subtilement avec la maturité du geste perceptible dans les toiles de Farah Atassi.

Est-ce un paradoxe ? Leurs univers pointent vers un lendemain des années 50 (celui des intérieurs peints de Farah Atassi, celui rock'n'roll d'Élodie Lesourd). Comme s'ils nous interrogeaient aujourd'hui, après ce qui est parfois décrit comme la fin des grands récits, sur l'hypothèse d'un prolongement toujours possible du propos artistique par la peinture.

Éric Degoutte



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