"Le paysage est ma maîtresse" écrivait John Constable en 1812 à sa future épouse. La déclaration pose d'emblée la relation quasi passionnelle qui l'attacha toujours à la Nature et résonne avec le caractère intime qui émane de tous ses paysages. Dans l'histoire de l'art britannique, Constable compte parmi les géants au même titre que William Turner qui était sensiblement du même âge que lui. Il ne cesse cependant d'être opposé à ce dernier qui cultivait davantage la grandeur. Turner, le voyageur européen. Constable, le promeneur de la campagne anglaise. Le carriériste contre l'amateur.
Parallèlement à ses recherches sur le paysage, John Constable se fit aussi portraitiste pour gagner sa vie. Il fut même embauché comme copiste par Wilbraham Tollemache, 6e comte de Dysart en 1807. Ses accointances avec cette illustre famille, l'amenèrent dans le Warwickshire à Malvern Hall, propriété de Henry Greswolde Lewis, pour faire des portraits. Mais ce séjour fut aussi l'occasion pour lui de travailler dans le parc alentour, comme en témoignent les nombreux croquis et esquisses à huile sur carton. La toile conservée par la Tate marque une étape décisive dans son évolution. Elle s'inscrit dans la tradition des « portraits » de grande demeure, mais elle contient aussi en germe des particularités qui feront l'originalité de John Constable dans les années à venir : le ciel dans la lumière du couchant traversé par une volée de corbeaux, les herbes sur la rive au premier plan esquissées à la hâte. La date du 1er aout 1809, inscrite sur le châssis d'origine, a fait dire que l'œuvre aurait pu être peintre en une seule journée. De ce fait, elle est souvent considérée comme sa première véritable toile de plein air.