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Françoise Pétrovitch. Habiter la villa

Article mis à jour le 13/07/20 00:21

Villa Savoye, Poissy

Exposition du 18 septembre 2020 au 24 janvier 2021

Initialement prévue du 30 avril 2020 au 30 août 2020, l'exposition Françoise Pétrovitch. Habiter la villa aura lieu du 18 septembre 2020 au 24 janvier 2021, en raison de la crise sanitaire du coronavirus.



Le Centre des monuments nationaux invite Françoise Pétrovitch pour une carte blanche à la villa Savoye du 18 septembre 2020 au 24 janvier 2021.

Pour l'exposition "Françoise Pétrovitch. Habiter la villa" l'artiste créera une quinzaine d'œuvres (peintures et sculptures) en dialogue avec l'architecture et les recherches chromatiques de Le Corbusier. Françoise Pétrovitch, née en 1964, bénéficie d'une reconnaissance nationale et internationale. Elle emploie de nombreux mediums – encre, peinture, céramique, bronze, vidéo, gravure, etc. – et joue sur les différentes échelles des projets. Ses natures mortes, portraits, et paysages sont traversés par les thèmes du double, de la transition et de la cruauté, et laissent rarement le spectateur indemne.

La « machine à habiter » qu'est la villa Savoye, considérée comme l'un des fleurons du Mouvement moderne, tire avantage de la « Polychromie architecturale » – stratégie de mise en relation des couleurs avec les espaces – conçue par Le Corbusier. Employant cette même gamme des couleurs et ajustant les dimensions des œuvres au format de l'architecture, Françoise Pétrovitch prolonge le geste de l'architecte et met ses pas dans ceux d'Eugénie Savoye, commanditaire de la villa en 1928. L'artiste ravive la présence des habitants de la maison : peinture de bouquet dans l'entrée, céramique au chat allongé dans la cuisine, bronze du Garçon à la poupée dans la salle de bain, paysage peint au format des fenêtres bandeau dans le grand salon, bronze de Jane dans le solarium… Les œuvres repeuplent avec finesse et par touches la villa « Les Heures claires » d'Eugénie Savoye, dans un rapport domestique et décoratif assumé.

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Affiche de l'exposition « Habiter la Villa ». Françoise Pétrovitch, Sans titre, 2019, huile sur toile, 160 x 130 cm, Courtesy Semiose (Paris). Photo : Hervé Plumet. © Françoise Pétrovitch / Hervé Plumet - Le Corbusier et Pierre Jeanneret, villa Savoye © FLC-ADAGP


À un siècle d'intervalle, l'artiste Françoise Pétrovitch évoque le souvenir d'Eugénie Savoye, commanditaire de la villa Savoye en 1928. En la choisissant comme point de départ de sa réflexion, l'artiste souhaite remémorer une personnalité incroyablement audacieuse, que rien ne prédestinait à faire appel au maître de l'architecture moderne qu'est Le Corbusier. À travers cette évocation, Françoise Pétrovitch approche également la villa dans sa dimension domestique, liée à sa fonction d'habitat et de lieu de vie, et en conséquence assume pleinement l'angle décoratif qu'induit une carte blanche dans une villa cossue. À la suite d'Eugénie, l'artiste habille la demeure et réinsuffle la vie dans cette « machine à habiter » comme la qualifiait son architecte.

L'exposition fait littéralement œuvre à partir de la villa : les peintures et les sculptures se mettent au diapason de la maison. Ajustant les dimensions des toiles au format de l'architecture et fondant ses accords sur les couleurs de la Polychromie architecturale de Le Corbusier, Françoise Pétrovitch prolonge le geste de l'architecte. Les contraintes d'installation forcent à s'ajuster au plus près de l'architecture et soulignent la beauté et la justesse des proportions et des détails. Par exemple, aux nombreuses baies en bandeau qui rythment le salon, l'artiste répond par une grande peinture horizontale, qui ouvre à son tour une fenêtre au moyen de l'image.

Le Corbusier comparait la villa « Les Heures Claires » – nom original donné par les Savoye à la villa – à « une véritable promenade architecturale, offrant des aspects constamment variés, inattendus, parfois étonnants ». À cette promenade architecturale, Françoise Pétrovitch superpose une « promenade picturale ». Attentive aux fonctions des pièces, à leur relation avec l'extérieur, à leur place dans le plan d'ensemble, l'artiste réserve des étonnements aux visiteurs, qui découvrent au fil de la visite, des œuvres cachées, à des emplacements imprévisibles. L'ensemble des pièces d'habitation est investi, en particulier les espaces intimes ou quotidiens, tels le cabinet de toilette, la cuisine ou les armoires des chambres.

Ainsi, le visiteur (re)découvrira la villa au gré de la quinzaine d'œuvres réparties au sein du monument, tout en s'imprégnant de l'univers de l'artiste, dont les œuvres réveillent subtilement la mémoire des lieux.

Le parcours commence par le vestibule du premier étage où le visiteur est accueilli par un tableau de bouquet dans un vase, posé sans façon sur la tablette. Plus loin, la chambre du fils reçoit dans les alcôves deux peintures d'adolescents, dans une attitude ambiguë, entre oisiveté et inquiétude. Au détour de la salle de bain, le long de la baignoire, la sculpture en bronze d'un garçon ceint d'une bouée crée un vibrant contraste de matières. Dans le prolongement, le boudoir est orné d'une peinture d'oiseau et de gants en céramique esquissant des jeux de mains devant la fenêtre. En poursuivant sur la terrasse, Jane, sculpture en bronze noir, bras levés et entourée d'une ceinture de plantes, brille de son éclat noir dans la lumière blanche du solarium. Enfin, la cuisine ménage aussi ses curiosités, tels le poulpe placé en embuscade dans l'évier, le chat alangui sur le plan de travail et l'assiette dans le passe-plat. Ainsi, le monde familier de l'artiste – fleurs, adolescents, animaux – repeuple la villa. Se tenant juste à la lisière de l'imaginaire, les œuvres inspirent une manière sensible d'habiter.

La peinture de Françoise Pétrovitch s'accorde parfaitement aux théories de l'architecte : Le Corbusier professait que « L'architecture est le jeu savant, correct et magnifique des volumes assemblés sous la lumière », là où l'artiste agence ses volumes et ses couleurs sur le blanc de la toile, appliquant ce même principe des contrastes sur fond de lumière. Révérente à l'intelligence et à la franchise des tons de la Polychromie architecturale du maître de l'architecture – lui aussi peintre –, l'artiste intègre le clavier des couleurs à sa propre palette. Les bleus outremer, terre de sienne ou céruléens divers, migrent des murs aux tableaux, et renforcent encore l'impression de déjà-là des œuvres. Car le succès de l'intervention de Françoise Pétrovitch réside dans cette gageure : donner l'illusion que ses œuvres ont toujours vécu dans la villa Savoye et qu'elles lui sont constitutives.



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