Exposition du 14 février 2020 au 13 septembre 2020
Le musée de la Vie romantique présente l'exposition "Coeurs. Du romantisme dans l'art contemporain", une exposition à voir à Paris à partir du 14 février 2020, jour de la Saint-Valentin.
À la manière de George Sand qui revendique pleinement ce geste profondément romantique d'ouvrir l'accès à la profondeur du cœur grâce à son écriture, l'exposition propose une découverte esthétique et symbolique du cœur et de sa représentation.
En écho aux quatre cœurs présents dans la collection, et surtout à l'une des thématiques phares du romantisme qu'est l'expression du sentiment amoureux, le musée de la Vie romantique présente ensemble pour la première fois une sélection de quarante œuvres contemporaines, de différents artistes.
Le cœur en tant que motif et symbole est abordé ici à travers différents media, aussi bien la peinture, le dessin, la sculpture, la céramique, que le néon et la photographie. Outre les figures emblématiques de Pierre et Gilles, Niki de Saint-Phalle, Annette Messager, Jim Dine, Sophie Calle, Françoise Pétrovitch et Jean-Michel Othoniel, le visiteur pourra découvrir dans ce parcours plus de vingt artistes essentiels dans l'histoire de l'art contemporain.
L'exposition "Coeurs. Du romantisme dans l'art contemporain" invite à revoir de façon sensible et poétique la collection du musée avec un prisme plus en lien avec la passion, le sentiment, le romantique, le tout directement sorti du cœur.
Présentée dans les deux espaces du grand atelier du peintre Ary Scheffer, l'exposition Cœurs, du romantisme dans l'art contemporain invite à découvrir une quarantaine d'œuvres de trente artistes actuels, autour de la représentation du cœur. Le parcours, organisé autour de sept sections, dessine les contours d'un cœur multiple : cœur ouvert, cœur artiste, cœur symbole, cœur amoureux, cœur brisé, cœur gravé et cœur éternel.
Cœur ouvert
« Et puis laisse ton cœur ouvert ! Le cœur, c'est la sainte fenêtre. »
Victor Hugo, Les Contemplations
Le cœur est d'abord un organe caché. Inaccessible aux regards, il est central dans la mécanique humaine et donne, par ses battements, la preuve d'un corps vivant. Si son fonctionnement et son anatomie sont aujourd'hui connus, la dissection des corps humains a longtemps été interdite, laissant libre cours au développement de puissantes projections symboliques. Les progrès scientifiques n'ont pas effacé cette part mystérieuse du cœur, que les œuvres rassemblées ici traduisent. Les artistes se saisissent de l'anatomie cardiaque tout en la détournant : Luise Unger utilise des fils d'acier pour figurer l'organe tandis qu'Oda Jaune met en scène une opération à cœur ouvert, réalisée par d'étranges créatures hybrides. À la fidélité anatomique de la représentation s'ajoute toujours une profondeur métaphorique et poétique.
Cœur artiste
« Ah ! frappe-toi le cœur, c'est là qu'est le génie »
Alfred de Musset, A mon ami Édouard B.
Cette exhortation d'Alfred de Musset fait du cœur le lieu originel de la création et une métaphore de la démarche artistique : l'art vient du cœur, le cœur est artiste. Les œuvres réunies ici présentent toutes le cœur de leurs créateurs. En le mettant en scène, les artistes composent leurs autoportraits respectifs. Représenter son cœur est une façon d'exprimer ses sentiments profonds, de retracer son histoire, de rendre palpables ses pulsations intérieures. En devenant visible, le cœur se transforme en un organe extérieur ; Pilar Albarracín, Marc Molk, Ouka Leele ainsi qu'Ida Tursic et Wilfried Mille jouent sur l'effet produit par cette inversion. Les artistes vont parfois jusqu'à le déposer hors du corps humain, rendant possibles de véritables radiographies, tantôt humoristiques, tantôt féroces, de leurs intériorités, tel le cœur de Niki de Saint-Phalle.
Cœur symbole
« Le cœur a la forme d'une urne. C'est un vase sacré tout rempli de secrets. »
Alfred de Vigny, Journal d'un poète
Le cœur est représenté par un triangle adouci, séparé d'une échancrure en une symétrie parfaite et le plus souvent de couleur rouge sang. Il ne s'agit pas d'une simplification formelle de l'organe, mais probablement d'une représentation schématique de la feuille de lierre, qui reste vivace toute l'année. Forme parmi les plus courantes de l'iconographie populaire, elle est devenue le symbole universel de l'amour. Plane et frontale, elle est facilement reproductible et très largement utilisée, depuis les dessins d'enfants jusqu'aux émojis des téléphones portables. Le symbole du cœur fonctionne comme un signe que les artistes détournent au gré de leur sensibilité artistique. À l'immense cœur voluptueux de Jim Dine, répondent les formes plus poétiques et fugitives des cerises et petits pois de Jacques Halbert et des perles de Jean-Michel Othoniel tandis que Françoise Pétrovitch figure l'ambivalence du cœur, témoin à la fois des premiers émois et des premiers tourments.
Cœur amoureux
« Vous aviez mon cœur,
Moi, j'avais le vôtre :
Un cœur pour un cœur ;
Bonheur pour bonheur ! »
Marceline Desbordes-Valmore, Pauvres Fleurs
Le cœur est avant tout le symbole de l'amour. Au XIXe siècle, ce sentiment devient l'idéal des passions humaines et exige alors une alliance absolue des âmes et des corps. L'accélération cardiaque provoquée par l'état amoureux est sûrement pour beaucoup dans cette association. Cette mystique amoureuse romantique, incarnée par la communion physique et spirituelle entre deux êtres, irrigue toujours nos sociétés contemporaines. Des artistes comme Ronda Bautista convoquent le cœur pour raconter des histoires d'amour et de couples, du coup de foudre à la vie conjugale. Ici, le cœur amoureux est multiple : parfois mièvre et d'un kitsch assumé par Pierre et Gilles, parfois érotisé ou détourné avec humour par Philippe Mayaux ou le duo Mrzyk & Moriceau, souvent tendre, toujours romantique, comme dans le tableau abstrait de John M. Armleder où un cœur bicolore occupe la place du soleil.
Cœur brisé
« Mets la main sur mon cœur, sa blessure est profonde ;
Élargis-la, bel ange, et qu'il en soit brisé ! »
Alfred de Musset, À George Sand
Pour les artistes et les écrivains romantiques, la blessure d'amour était un puissant motif de création et la condition d'une vie pleinement vécue : « J'ai souffert souvent (…) mais j'ai aimé. C'est moi qui ai vécu » affirme Perdican à Camille dans On ne badine pas avec l'amour d'Alfred de Musset. Le cœur est, par excellence, le foyer de la maladie d'amour et des tourments qui l'accompagnent. L'imaginaire amoureux contemporain prolonge cette grammaire romantique du chagrin, figurée par le cœur naufragé d'Annette Messager, le cœur transpercé de Marc Molk ou celui suturé de Winshluss. Toutes les facettes du cœur brisé sont ainsi explorées. Françoise Pétrovitch met en scène la cruauté de l'être aimé et la captivité du cœur tandis que Sophie Calle va jusqu'à évoquer la mort et le deuil. Parés de noir et empreints d'une tristesse singulière, ces différents cœurs évoquent l'universalité et l'intemporalité du chagrin amoureux et deviennent des supports à projection pour ceux qui les regardent.
Cœur gravé
« Quoi de plus intéressant que l'histoire du cœur quand elle est vraie ?
Il s'agit de la faire vraie, voilà le difficile. »
George Sand, Correspondance
Lorsque les cœurs ont été tourmentés, blessés ou brisés, que reste-t-il des histoires d'amour ? Alors que les écrivains et les peintres romantiques plaçaient le cœur au centre de leurs œuvres pour immortaliser leurs sentiments, les artistes d'aujourd'hui rendent hommage à cet imaginaire amoureux qui perdure au-delà de la relation vécue. Claude Nori photographie les graffitis d'amoureux sur la côte italienne et dans la maison de Roméo et Juliette à Vérone tandis que Marc Molk associe la littérature au dessin en réalisant un calligramme-manifeste proclamant l'idéal romantique. Vincent Olinet et Hsia-Fei Chang soumettent le cœur à la puissance du hasard et à l'éternité des sentiments. L'écrit - archive concrète des relations passées - est une matière inépuisable pour questionner les cœurs et les graver dans la durée.
Cœur éternel
« À ce cœur si rompu, si amer et si lourd,
Accorde de dormir sans songes et sans peines,
Sauve-le du regret, de l'orgueil, de l'amour,
Ô pitoyable nuit, mort brève, nuit humaine !… »
Anna de Noailles, Le Cœur innombrable
Comment raconter le cœur au-delà du temps ? Le dénouement tragique de Roméo et Juliette de Shakespeare inspire toujours prodigieusement les imaginaires amoureux. Chez les artistes romantiques, la recherche d'un amour qui transcende les existences s'exprime par des liens étroits avec la mort. La représentation du cœur dépasse ainsi la durée circonscrite des vies humaines et cherche à atteindre l'immortalité nécessaire à l'amour éternel, comme l'illustre le crâne spectaculaire de Gilles Barbier. Mais les mutations rapides de nos sociétés contemporaines interrogent : comment aimerons-nous dans le futur et à quoi ressembleront les cœurs qui nous suivront ? Projetés dans un autre temps que le nôtre et dans un avenir que nous ne connaissons pas, les cœurs du futur d'Hsia-Fei Chang et de Martine Aballéa sont soumis à tous les possibles.
L'exposition "Coeurs. Du romantisme dans l'art contemporain" se prolonge dans les espaces des collections permanentes du musée : atelier salon et pavillon. La bibliothèque de l'atelier-salon présente d'autres facettes revêtues par le cœur : le cœur mystique, le cœur anatomique, le cœur profane des cartes à jouer, le cœur littéraire des auteurs romantiques. D'autres œuvres ponctuent le parcours des collections : l'Obélisque aux cœurs rouges de Niki de Saint Phalle, véritable manifeste des sentiments de l'artiste, évoque une vision érotisée et radicale de l'imaginaire amoureux contemporain. Dans le pavillon, les cœurs dessinés, façonnés, tissés de Jorge Orta, Agatha Ruiz de la Prada et Delphine Coindet trouvent leur place aux côtés des quatre petits bijoux provenant des souvenirs de George Sand conservés au musée.