Fasciné par la figure de l’Imperator romain qu’il perçoit comme un homme providentiel, réformateur et
conquérant habile, Napoléon III (1808-1873) s’engage dans la rédaction de l’Histoire de Jules César à la
fin des années 1850. Au travers des deux tomes de l’ouvrage publiés en 1865 et 1866, il s’agit pour lui
d’apporter les preuves tangibles du génie d’un César parvenu au pouvoir dans une République romaine
secouée par les guerres civiles et, par-là, de justifier l’instauration du « césarisme démocratique » à la
française.
Pour mener à bien ce projet d’envergure, Napoléon III s’entoure de collaborateurs de renom dans le
domaine de l’histoire romaine, des sciences de l’Antiquité et du génie militaire. Alfred Maury, Prosper
Mérimée, Auguste Verchère de Reffye, Félicien de Saulcy, Eugène Stoffel, Léon Renier ou Wilhelm
Fröhner rencontrent régulièrement l’empereur dans son Cabinet des Tuileries.
Napoléon III n’entend pas s’appuyer sur les seules sources littéraires. Après une étude minutieuse des
textes antiques, une recherche toponymique et topographique, l’empereur veut étayer les récits de César
par des recherches sur le terrain. De 1861 jusqu’à la chute du Second Empire en 1870, les fouilles
et prospections s’enchaînent pour retrouver les sites décrits dans les Commentaires sur la guerre des
Gaules et les Commentaires sur la Guerre civile. S’ajoutent les fouilles menées par Pietro Rosa dans les
jardins Farnèse sur le Palatin, en quête de la Roma quadrata, le berceau des césars.
En s’appuyant sur le monde savant et en mobilisant militaires, préfets, diplomates, architectes et
pensionnaires de l’Académie de France à Rome, le dessein de l’empereur va dépasser l’enjeu politique
initial. Portés par les innovations techniques, les archéologues recourent à la cartographie, au dessin et
à la photographie pour restituer le réel, attester la provenance authentique des objets et dresser un état
des lieux qui se veut objectif et méthodique. Cet enregistrement minutieux des données contribue à la
formation d’une archéologie scientifique.
Plus encore, une diffusion rapide des fouilles et de leurs produits auprès des publics s’impose comme un
défi supplémentaire. Albums photographiques, gravures, moulages et musées célèbrent alors l’aventure
archéologique de Napoléon III, d’Alésia à Rome.
Les fouilles nationales et les missions à l’étranger
- César ou la recherche d’un modèle
Arrivé au pouvoir par un coup d’État, en manque de légitimité et de crédibilité, Napoléon III se voit
pourtant comme un homme providentiel appelé à laisser sa marque dans l’histoire, comme les grands
hommes du passé. César, sur qui avait déjà écrit Napoléon Ier, lui sert de modèle pour développer ses
conceptions politiques, que l’on résume sous le terme de Césarisme. Par ailleurs, l’intégration de la Gaule
dans l’empire romain, vue comme un progrès de la civilisation, sert à modéliser l’action de la France dans
ses colonies. Napoléon III se livre donc à une relecture des entreprises de César, dont les textes sont
malheureusement difficiles à comprendre, car il n’est pas possible, en 1860, de dresser une carte de la
Gaule à l’époque du général romain.
Cette cartographie est donc la mission fixée d’abord à la Commission de Topographie des Gaules,
puis aux archéologues qui recherche les lieux de la conquête romaine. Ces hommes sont souvent choisis
parmi les militaires, rompus à la lecture des cartes, aux levés de terrain, à l’interprétation topographique.
Au début des années 1860, on repère les sites d’Alésia, Gergovie, Uxellodunum (le Puy d’Issolud), puis
de Bibracte (le Mont Beuvray).
- La rencontre d’un homme et d’une époque
L’entreprise coloniale, les nouveaux moyens de voyager qui raccourcissent les distances et la recherche d’alliances politiques ou de débouchés économiques réunissent les conditions pour le lancement d’expéditions à but scientifique en direction de sites archéologiques : comparables aux grandes explorations de la Renaissance, ces missions cherchent à dresser la carte de mondes disparus. Napoléon III est à l’origine de missions en Roumaine, en Turquie, en Macédoine, en Grèce, en Égypte, en Mésopotamie. Ces explorations, soutenues par des institutions savantes, sont parfois financées sur la cassette personnelle de l’empereur. Napoléon III est à ce jour le seul dirigeant français à avoir fait de l’archéologie une affaire d’État.
À la recherche de Jules César, conquérant des Gaules :
la Commission de Topographie des Gaules (CTG) et la question d’Alésia
La Commission est créée le 17 juillet 1858 sous l’impulsion de Napoléon III. Félicien de Saulcy,
numismate et ancien directeur du musée de l’Artillerie, la préside, entouré d’une équipe pluridisciplinaire
de savants reconnus comme Alfred Maury, Casimir Creuly, Lucien Blondel ou Alexandre Bertrand. La
CTG a pour mission d’analyser et de cartographier les informations envoyées au ministère de l’Instruction
publique par les recteurs, les archivistes, les préfets et les sociétés savantes mobilisés par la collecte des
données nécessaires à la rédaction de l’Histoire de Jules César.
La Commission s’engage tout d’abord aux côtés de l’empereur pour retracer les mouvements de
l’armée romaine, et implique ses membres dans des prospections et des fouilles sur l’ensemble du territoire
afin de localiser les sites des campagnes de César dans les Gaules.
En 1855, l’architecte Alphonse Delacroix propose de placer Alésia à Alaise, au sud de Besançon. Bientôt,
de nombreuses autres communes se portent candidates pour incarner le site emblématique. La France
savante est en ébullition. Deux camps se forment, et partisans d’Alise et d’Alaise s’affrontent par articles
interposés.
La CTG se doit de prendre position. Vite convaincue par la topographie d’Alise-Sainte-Reine, elle engage,
à partir d’avril 1861 et sur ordre de Napoléon III, des fouilles rigoureuses sous la conduite de Saulcy, de
Bertrand et de Creuly. Elle parvient en 17 mois à repérer avec précision les fossés du siège de César. En
septembre 1862, la CTG laisse la place à Eugène Stoffel, officier d’ordonnance de l’empereur, qui mène
jusqu’en 1865 le chantier tambour battant. Pour Napoléon III, les fossés, l’emplacement des camps, les
armes et surtout les monnaies apportent les preuves de l’identification d’Alésia.
La CTG, se concentre ensuite sur le recensement et l’enregistrement des vestiges « celtiques » à l’aide de
formulaires envoyés à ses correspondants dans les départements. Elle rédige le Dictionnaire archéologique
de la Gaule, multiplie les cartes de géographie historique avec le concours du Dépôt de la Guerre et
participe à la création du concept de préhistoire, avant de disparaître en 1879.
Cartographie, relevés et dessins
À Alise, comme à Gergovie, au Puy d’Issolud ou au Palatin, des plans et relevés de fouille sont
soigneusement et rigoureusement produits. Cependant, les cartes et relevés des militaires et agentsvoyers réalisés pour les sites de la guerre des Gaules se distinguent des plans traditionnels et élévations
produits par les architectes en charge des fouilles des Jardins Farnèse : la cartographie dressée par les
levers de terrain avec triangulation permet d’embrasser les vastes zones de combat et de souligner les
reliefs mentionnés par Jules César dans ses Commentaires. Les dessins des paysages ou ceux plus
techniques des relevés réalisés par les militaires et par les agents-voyers complètent les cartes avec
précision. Cette utilisation de la cartographie est souvent couplée avec les travaux du Dépôt de la Guerre
chargé de produire la Carte de France, ou Carte d’État-major. Ces opérations favorisent un enregistrement
scientifique des données archéologiques, comme le montre le cas exemplaire des fouilles menées par la
Commission de Topographie des Gaules à Alise-Sainte-Reine.
Sur le Palatin, Pietro Rosa dresse, avec le pensionnaire de l’Académie de France à Rome Arthur Dutert,
maints relevés des jardins Farnèse. Malheureusement, n’en restent que quelques croquis dans ses
notes de fouilles. Mais, grâce à John Henry Parker, il nous est aujourd’hui possible de reconstituer en
grande partie la méthode d’exploration de Rosa et l’évolution du chantier. Ce libraire et éditeur anglais
féru d’histoire romaine est co-fondateur de la British and American Archeological Society of Rome puis
devient conservateur de l’Ashmolean Museum d’Oxford. Entre 1864 et 1877, il publie un vaste reportage
photographique consacré au patrimoine historique et archéologique italien. Il s’associe au dessinateur
Filippo Cicconetti pour dresser des coupes qui sont ensuite photographiées. L’attention portée aux vues
stratigraphiques, aux relevés et aux techniques de construction annonce la photographie archéologique
moderne.
Les fouilles du Palatin
- À la recherche des palais des Césars
Sur la colline prestigieuse où Rome fut fondée, ont résidé les grandes familles de la République
romaine, puis les empereurs successifs. En 1550, le cardinal Alessandro Farnèse en transforme une partie
en jardins et y prélève des sculptures qui alimentent sa collection d’antiques. En 1861, l’épigraphiste Léon
Renier, envoyé à Rome pour négocier l’achat de la collection Campana, acquiert les jardins Farnèse, soit
la quasi-totalité du Palatin, pour le compte de Napoléon III. Achetés sur les fonds propres de l’empereur,
ces terrains, jusqu’alors détenus par le roi des Deux-Siciles, deviennent propriété privée de Napoléon III.
Celui-ci s’empresse de confier des fouilles à l’italien Pietro Rosa, qui se poursuivent jusqu’en 1870.
Rosa est architecte et ne cherche pas d’œuvres d’art : il veut comprendre comment les empereurs ont
occupé le site, dégager les palais qu’ils ont construits et les rendre visitables. Entre 1861 et 1867, Rosa
fouille la pente dominant le Circus Maximus et celle qui donne vers le Forum, cherchant à circonscrire la
Rome primitive, ses murailles et ses portes. Dès 1863, il s’intéresse à la Domus Tiberiana, puis au temple
d’Apollon. Mais sa grande découverte reste la Maison de Livie, femme du premier empereur Auguste, qui
intervient en 1869.
- L’Antiquité rêvée en couleurs
Pour la première fois à Rome, on découvre en parfait état un grand décor peint à la fresque,
composé d’architectures en trompe l’œil et de tableaux mythologiques. Afin d’immortaliser ces peintures
de la Domus Tiberiana et de la maison de Livie, puis de les faire connaître, intervient un pensionnaire
de l’Académie de France à Rome, le peintre Fortuné Layraud. Sur la base de photographies prises
préalablement, Layraud reproduit fidèlement la fresque, restituant sur toile les dommages et lacunes subis
par la couche picturale. La peinture n’est ici qu’un moyen de suppléer à l’incapacité de la photographie à
rendre compte des couleurs.
La technique photographique dans la seconde moitié du XIXe siècle
Sous le Second Empire, la technique photographique est loin d’avoir atteint sa pleine maturité. Nombre
d’inventions visent à améliorer le rendu de l’image, ainsi que l’ergonomie et le poids du matériel.
- L’emploi du collodion humide sur plaque de verre
En 1851, le procédé du négatif sur plaque de verre au collodion, promu par Scott Archer, est salué pour
la qualité de son rendu au grain très fin, avec une large gamme de gris et une belle clarté des blancs.
Appliquée sur le verre, la couche de cellulose renfermant des sels d’argent est d’une sensibilité plus
élevée que l’albumine utilisée auparavant. Elle permet de recourir à des plaques de grands formats pour
des tirages de grande taille, elle abaisse le temps de pose et, enfin, elle autorise des tirages multiples.
Cependant, le collodion présente un défaut majeur : le photographe doit exposer et développer la plaque
de verre avant que le collodion ne sèche. Il doit donc être posé sur la plaque in situ devant le sujet à
photographier et dans l’obscurité, ce qui exige l’emploi d’un laboratoire portatif encombrant chargé de
produits chimiques à la manipulation délicate.
- Un matériel volumineux
Tout photographe devant exécuter des prises de vue en extérieur doit se doter, en plus du laboratoire,
d’un appareil photographique, d’un pied sur lequel le poser, de plaques de verre, de châssis dans lesquels
les insérer, d’une chambre noire portative, de l’eau pour le lavage et le rinçage des clichés. Le pied, de
préférence à trois branches et à coulisse, permet d’installer l’appareil quel que soit le terrain et d’adapter
sa hauteur. Lorsqu’il s’agit d’obtenir de larges panoramas, il est parfois nécessaire d’utiliser un pied avec
échelle pour monter à plus de 3 mètres de haut.
En ce milieu du XIXe siècle, la multiplication des missions scientifiques et archéologiques rend nécessaire la production d’appareils de plus en plus légers et l’usage d’un matériel moins embarrassant. C’est ainsi que Gustave Anthoni annonce en 1861 son invention de la chambre portative à collodion humide qui consiste à exécuter au jour les préparations du collodion humide dans une boite close faisant partie de la chambre noire qui intègre également une cuvette avec l’agent révélateur.
Le suivi photographique des fouilles des jardins Farnèse
Ayant recours à la photographie dans sa quête des Palais des Césars, Rosa s’inscrit dans une approche
nouvelle du terrain, de plus en plus pratiquée après 1850 : il place, dès le début du programme de fouille,
la preuve visuelle au cœur de sa recherche et confronte les sources littéraires antiques aux vestiges. Il
démontre par l’image, parfois naïvement et de façon erronée, leur identification. La photographie prouve
l’efficacité des travaux et garde trace des découvertes. Elle est confiée à Pietro Dovizielli, photographe
romain de renom, dont la production se compose surtout de vues d’ensemble qui reproduisent chaque
secteur du site. Le photographe cède à la tentation du pittoresque, opposant ruines et nature, offrant
une composition de la scène archéologique. Il produit également plusieurs portraits des terrassiers et
documente les collections de l’Antiquarium. Les images, d’abord destinées à informer l’empereur de
l’avancée des travaux, servent aussi aux présentations orales devant l’Académie des inscriptions et belleslettres. Des tirages sont assemblés et Napoléon III les fait déposer auprès des institutions françaises les
plus influentes, tels les deux albums photographiques remis en 1869 par Léon Renier à la bibliothèque de
l’École normale supérieure.
L’ouverture au public des jardins Farnèse, ordonnée par l’empereur, facilite considérablement l’accès des
fouilles aux autres photographes tout en entretenant le commerce de la photographie de ruines. Ludovico
Tuminello, les frères Alinari, James Anderson, Robert McPherson ou encore Alphonse Bernoud exercent
de façon ponctuelle ou régulière leur activité, et fournissent en images les touristes de passage.
Ce réseau d’images, impulsé par Napoléon III en personne, laisse entrevoir une stratégie de communication.
Il s’agit d’illustrer l’évolution positive du projet romain auprès de la communauté savante, artistique et
militaire, et de rendre compte de l’ampleur de la tâche accomplie par la France dans la cité des Césars.
L’Antiquarium du Palatin
Les découvertes archéologiques les plus remarquables issues des fouilles des jardins Farnèse sont
exposées par Pietro Rosa dans le premier musée du Palatin, situé au rez-de-chaussée d’une construction
des princes Farnèse, la Torretta, logement du gardien des fouilles, situé à l’intérieur de la Domus Tiberiana et
donnant sur le Forum. Inauguré en mars 1863, l’Antiquarium est constitué d’un seul vaste espace, qui nous
est connu grâce à des clichés pris par le photographe Pietro Dovizielli, qui documentent essentiellement
les statues. Le visiteur peut aussi voir dans l’Antiquarium une collection d’échantillons prélevés dans les
matériaux de construction du Palatin : albâtre, porphyre, granit, cipolin jaune, nero antico, rosso antico…
réunie dans la volonté de constituer une base de référence, qui correspond bien à l’esprit scientifique du
temps.
L’Antiquarium expose aussi des vitrines de terres cuites, d’objets en verre, d’os et d’ivoires et
quelques fragments de bronze. La disposition des statues trahit la survivance d’un type traditionnel
de présentation des collections, comme on en voit dans les palais aristocratiques, esthétisante et
essentiellement décorative. En revanche, la présence de ces vitrines d’objets sans noblesse correspond
aux prémices des musées archéologiques, où le matériel mis au jour – à l’exception ici de quelques pièces
expédiées en France – est exposé sur les lieux mêmes de sa découverte.
Le succès est au rendez-vous. Rosa compte trente mille visiteurs par mois sur le site, qui viennent
voir les ruines, les fragments d’architecture ou de sculpture issus des fouilles, que Rosa expose en plein
air, fixés sur des sortes de candélabres en maçonnerie dressés à l’emplacement de leur découverte, et
l’Antiquarium. Ce dernier est dépourvu de tout panneau ou de toute notice, à la différence du site, que
Rosa ponctue de pancartes explicatives agrémentées de citations latines.
L’existence du musée du Palatin, voulu par Napoléon III, est brève : successeur de Rosa, Rodolfo
Lanciani le démolit en 1882 afin de poursuivre les fouilles. Transférées au Musée national, les œuvres ont
été par la suite, pour la plupart, réinstallées dans le nouvel Antiquarium actuellement ouvert sur le Palatin.
Un musée pour César
- La création du Musée gallo-romain
Le Musée gallo-romain, aujourd’hui musée d’Archéologie nationale, est fondé le 8 mars 1862 par décret
impérial. Il répond à la passion de Napoléon III pour l’archéologie, aux demandes des savants, et au
besoin de conserver les nombreux objets et documents rassemblés par la Commission de Topographie
des Gaules.
Le personnel affecté au musée est lié à l’identification d’Alésia avec Alise : le premier directeur auquel
succède Alexandre Bertrand en 1866 est Claude Rossignol, archiviste en Côte-d’Or. Il est assisté par
Philibert Beaune, autre Bourguignon. Le noyau des collections se forme rapidement, en grande partie par
les dons de l’empereur. Les pièces d’armement trouvées à Alise affluent au musée dès 1864 après leur
restauration dans les ateliers de Meudon dirigés par Auguste Verchère de Reffye.
Le 12 mai 1867, Napoléon III inaugure le musée et offre à sa bibliothèque les deux tomes de l’Histoire
de Jules César richement reliés. Le chantier de restauration du château est si lourd que seules les sept
premières salles sont achevées. Elles couvrent la Préhistoire, l’âge du Bronze et les âges du Fer, en
faisant la part belle à l’histoire naturelle et à l’épigraphie. La Salle de César ou Salle de la conquête, ou
encore Salle d’Alésia, tant attendue par l’empereur, n’existe pas encore.
- La salle de la Conquête, ou Salle d’Alésia en 1869
Bien que provisoire, la muséographie de la Salle d’Alésia est déjà démonstrative et didactique. L’art militaire
romain en est le cœur ; des moulages tirés de la colonne Trajane fournissent les exemples de costumes
et d’armes. Les maquettes en plâtre peint des appareils de siège d’Avaricum, Alésia, Uxellodunum et du
pont sur le Rhin côtoient les modèles réduits des catapultes et les reconstitutions de pilums. Au centre,
l’immense plan d’Alise-Sainte-Reine restitue la topographie des lieux à partir des relevés de l’État-major
et des vues photographiques. Il est accompagné des monnaies et des armes trouvées dans les fossés.
Le matériel archéologique découvert lors des fouilles impériales et de nombreux moulages sont présentés
autour de la salle.
La salle définitive, la salle XIII au 1er étage du château, n’ouvre qu’en 1879.
La diffusion des fouilles par le moulage
L’importance donnée aux fouilles impulsées par Napoléon III en France et en Italie nécessite une
diffusion rapide auprès de la communauté scientifique. En complément des articles publiés, des albums
de photographies et, moins accessibles, des documents de la Commission de Topographie des Gaules
conservés au Musée gallo-romain, des moulages sont réalisés sur une sélection d’objets découverts. À
cette époque, le marché d’édition des tirages (ou épreuves) en plâtre, produits à partir de moules réalisés
sur les œuvres originales, est en pleine expansion. Les musées et les particuliers sont friands de ces
copies qui leur permettent d’étudier et de présenter des objets en trois dimensions, la forme et l’aspect de
surface étant conservés.
- Un atelier de moulage au musée gallo-romain
Tandis que l’atelier de moulages des musées nationaux et celui de l’École des Beaux-arts de Paris
produisent depuis longtemps déjà des copies des sculptures conservées au Louvre et dans les grands
musées européens, l’essor de l’archéologie nationale motive la création d’un atelier spécialisé dans la
reproduction d’objets archéologiques. Créé en 1864 et installé rue de Sèvres à Paris, il déménage en
1866 à Saint-Germain-en-Laye. Il est placé sous la direction d’Abel Maître, qui travaille déjà pour Auguste
Verchère de Reffye. Dès les premières années, il propose à la vente de nombreuses reproductions d’armes,
dont plus d’une centaine d’après les objets mis au jour dans les fouilles d’Alise-Sainte-Reine menées par
la Commission de Topographie des Gaules.
Les moules à pièces, dits à bon creux, permettent de faire plusieurs épreuves en plâtre, qui sont souvent peintes avec une grande attention à l’aide de gomme laque et de pigments de couleur. Les armes d’AliseSainte-Reine sont très demandées. Les tirages en plâtre exécutés dans l’atelier servent de cadeaux diplomatiques, de monnaies d’échange ou à répondre aux nombreuses commandes, et se retrouvent ainsi dans toute l’Europe.