"Où je vivais étant enfant, il n'y avait pas d'artiste et il n'y avait point d'art, aussi n'avais-je aucune idée de ce dont il s'agissait." Jasper Johns
Jasper Johns, peintre et dessinateur américain, naît le 15 mai 1930 à Augusta en Géorgie et grandit en Caroline du Sud.
Jasper Johns commence à dessiner dès son enfance et à l'âge de 5 ans sait déjà qu'il veut être un artiste.
En 1947, Jasper Johns entre à l'Université de Caroline du Sud à Columbia où il étudie pendant trois semestres. Ses professeurs d'art le poussent alors à s'installer à New York, ce qu'il fait à la fin de 1948. Il y voit de nombreuses expositions et fréquente la Parsons School of Design pendant un semestre où il apprend le dessin publicitaire, avant d'être enrôlé dans l'armée américaine. Après avoir servi deux ans dans l'armée pendant la guerre de Corée, en poste en Caroline du Sud et à Sendai, au Japon, il retourne à New York en 1953. Très vite, il se lie d'amitié avec Robert Rauschenberg, John Cage et Merce Cunningham.
En 1958, lors de sa première exposition solo à la Galerie Leo Castelli de New York, Jasper Johns présente ses premières peintures à la cire représentant des drapeaux, des cibles et des nombres.
Après sa rencontre avec Marcel Duchamp, Johns commence vers 1960, une série de sculptures représentant des objets ordinaires, comme des ampoules électriques ou des boîtes de bière. Il réalise également des dessins et des lithographies.
Expositions Jasper Johns (sélection)
2007 : "Jasper Johns, An Allegory of Painting, 1955–1965" - Kunstmuseum Basel
Jasper Johns compte parmi les représentants majeurs de l'art américain de la seconde moitié du vingtième siècle. Il s'est imposé dès sa première exposition personnelle, organisée à New York en 1958. Jasper Johns entretient des liens de longue amitié avec le Kunstmuseum Basel.
Présentée en exclusivité en Europe, l'exposition bâloise se concentre sur l'œuvre novatrice que Jasper Johns réalise au début de sa carrière, à partir du milieu des années 50, avec entre autres la fameuse toile "Cible avec quatre visages", conservée au Museum of Modern Art de New York. Jasper Johns utilise des éléments de la culture populaire qui s'apparentent à des signes, par exemple une cible ou le drapeau américain, pour les transposer en quelque sorte en ready-mades dans une peinture gestuelle : "Ce sont des choses que notre esprit connaît déjà. Cela me donne la liberté de travailler à d'autres niveaux." (Jasper Johns)
À travers sa peinture, Johns s'est frayé une nouvelle voie, en prenant ses distances avec l'absolutisme non figuratif de l'Expressionnisme abstrait qui régnait alors en maître, exerçant sa toute-puissance sur les émotions du spectateur par le biais de ses formats gigantesques. En outre, il a développé des techniques de création inédites. Non seulement il emploie le principe du collage, avec par exemple des fragments de journaux, mais il utilise aussi un mélange de couleur et de cire liquide, le procédé dit de "l'encaustique", qui donne d'une part une certaine transparence à la surface peinte, de l'autre une compacité qui la fait ressembler à de la peau. Par ailleurs, il fixe aussi directement sur la toile des objets réels – ce sont surtout des reliques du processus pictural comme une boîte de peinture ou une règle graduée, en créant ainsi une relation multiple entre l'espace fictif de l'art et le monde matériel de l'usage et de la consommation : "Mon utilisation des objets dérive de l'idée qu'une peinture est un objet et du fait que j'ai pris en compte le caractère matérialiste de la peinture : en voyant que la peinture est de la couleur sur une toile et en considérant ensuite, par extension, qu'elle occupe un espace et qu'elle est accrochée au mur, et d'autres choses de ce genre, et en me demandant pour finir si ces éléments paraissaient nécessaires à ce que je faisais."
L'œuvre de Jasper Johns a joué un rôle déterminant non seulement pour la naissance du Pop Art, mais aussi pour maintes autres innovations artistiques. L'exposition du Kunstmuseum n'est pas une rétrospective des travaux de ses premières années, mais elle se focalise, à travers des peintures, des dessins et des travaux graphiques, sur quatre domaines thématiques choisis pour leur exemplarité, sur leurs variations et, surtout, sur la manière dont ils s'entremêlent librement et de façon pour ainsi dire narrative durant cet intervalle de dix ans. Ce champ de référence à quatre branches prend naissance avec le motif de la cible, qui a valeur de signe et recèle déjà le potentiel des domaines thématiques que l'artiste arpentera par la suite : la présence d'"appareils" mécaniques servant à la production du tableau, par exemple une latte de bois pivotante, qui trace, à la manière d'un compas, des contours circulaires, mais qui est également employée pour étendre régulièrement la couleur ; la dénomination des couleurs primaires rouge, jaune et bleue au moyen de lettres tracées au pochoir et leur utilisation qui ne correspond pas forcément à cette désignation ; et pour finir l'empreinte de son propre corps, par exemple des mains ou du visage.
Les cercles concentriques des tableaux-cibles suggèrent aussi bien quelque chose de figuratif ou d'abstrait, mais ils échappent de manière hypnotique à toute détermination. Ce faisant, Johns se préoccupe moins de la réalité infiniment reproductible de la culture de masse, comme cela sera par la suite le cas des représentants du Pop Art, qu'il ne s'intéresse aux moyens de l'acte artistique lui-même, en jouant de manière allégorique avec les nouvelles conditions de la peinture, dont il poursuit par ailleurs le développement à travers le dessin et la gravure. Son œuvre conjugue la distance sceptique et le laisser-faire intuitif, l'acuité conceptuelle et l'enchantement pictural. Ces pôles de tension marquent le travail pionnier de la première décennie, qui, en dépit de toute son immédiateté, demeure pourtant insondable.
Jamais encore, l'importance essentielle du développement continu et processuel de différents registres thématiques dans l'art de Jasper Johns n'avait été montrée de manière aussi évidente et directe. D'abord présentée à la National Gallery of Art de Washington, l'exposition bâloise offrira en exclusivité au public européen de voir quelque 70 oeuvres majeures prêtées par des musées et des collections privées des États-Unis et d'Europe.